Le récit de Marie-Agnès sœur de Charles De Gaulle
Charles qui a 23 ans et plein de fougue, ne dérogeait pas à la règle. Malgré tout, plus intelligent que la moyenne, sa vision de la guerre évoluera constamment face aux réalités du combat.
Charles, d’après son ordre de mobilisation, les fameuses 4 feuilles roses, doit être présent au régiment au 5ème jour de la mobilisation. Il était déjà à Arras, en garnison au 33ème RI à cette époque.
Il n’a pas eu le temps de voir les premiers mobilisés partir vers le front. Les adieux avec les proches étaient souvent pénibles, l’ambiance pesante. Mais, on constatait qu’il y avait peu d’insoumis. La confiance, l’optimisme même, régnaient. On serait de retour bien avant Noël entendait-on à la cantonade.
Pour Charles donc, pas de temps à perdre ! Il est affecté à la 11ème compagnie, 1ère section. Il sert sous les ordres du Lieutenant-Colonel Stirn, fraichement nommé.
Son prédécesseur, le Colonel Philippe Pétain, a été nommé à Saint-Omer, le 29 avril, où il commande, par intérim, la 4ème brigade d’artillerie en attendant, à 58 ans, la retraite. La guerre allait en décider autrement.
Il faut accueillir et équiper ceux qui arrivent de partout. Leur fournir le barda, l’uniforme, les rations, et le fusil car là, plus question de manœuvres. Mais bon, en bon officier, tout ceci était grisant, jubilatoire même.
Il me relata ces quelques jours un peu plus tard. Les derniers diners entre jeunes officiers ont été festifs, arrosés aussi.
Et puis hop, l’ordre de mettre en marche est arrivé. Le 5 août, le régiment lève une dernière fois les couleurs sur la Place d’Armes de la caserne Schramm. L’émotion est intense, l’après-midi est réservée aux derniers préparatifs. Charles me montra ce qu’il avait marqué sur son carnet ce jour-là !
Adieu mon appartement, mes livres, mes objets familiers. Comme la vie paraît plus intense, comme les moindres choses ont du relief quand peut-être tout va cesser.
Le 6 août, enfin la troupe sait à quoi s’en tenir. A l’aube, les troupes marchent vers la gare d’Arras, les troupes embarquent et dès 6 heures du matin : Départ, direction Hirson !
Ah ! Que ce voyage fut agréable, le plus beau jour de la guerre, il faisait beau, les gars chantaient me déclara Charles. On avait amené de quoi boire, beaucoup même, trop… Un triomphe, une épopée allait commencer !
La nuit du 7, on plante le bivouac à 3 km d’Hirson dans la charmante bourgade de Saint-Michel. Le lendemain et le jour suivant : 70 km de marche pour camper à Maubert-Fontaine puis à Bourg-Fidèle dans les Ardennes à 2 km de Rocroi.
Rocroi où les Français sortirent vainqueurs, le 19 mai 1643. Heureux présage non ?
Là-bas, on explique la situation aux officiers : les Allemands par l’intermédiaire du corps d’armée commandé par le général Von Emmich a envahi la Belgique. Le général Sordet fait face aux Allemands mais rapidement, des renforts sont nécessaires. Il est demandé au 33ème d’aller se porter sur la Meuse.
Le 13 août, le régiment entre dans la ville belge de Treignes où il est acclamé par de vibrants « Vive la France » !
Au loin, se situait l’imposante citadelle de Dinant, direction prise dès le lendemain par le 33ème. Pour le régiment, le baptême du feu allait se produire, le premier choc sérieux entre les 2 armées ici en Belgique !
Enfin ! Enfin ! Pensaient les hommes !
Pour le 33ème, la première escarmouche se produit le 14, lorsqu’une compagnie d’uhlans allemands s’avance à Anthée où est stationné le 33ème.
A 17 heures, ordre est donné de stopper cette avancée par un tir nourri de mitrailleuses. Les fameuses mitrailleuses Saint-Étienne si difficiles à utiliser car elles ne refroidissent jamais !
Mais les uhlans se replient peu après.
Ces mitrailleuses sont à l’origine d’une plaisanterie qui courrait dans l’armée où l’on demandait aux nouvelles recrues combien de temps mettait le fût du canon de la mitrailleuse pour refroidir. Et les anciens de rire de bon cœur devant l’embarras de la « bleusaille » qui essayait de trouver une réponse cohérente et intelligente. Jusqu’à la chute de l’histoire qui en laissait plus d’un « bleu-bite » pantois !
Et bien, le fût du canon pour refroidir met, met… un certain temps !
Et tous les anciens de rire à ce qui aurait pu faire un sketch au théâtre de la troupe.
Après il n’y eut plus de plaisanterie !!!
Alors ce fut le début d’une longue, très, trop longue guerre
Le lendemain, 15 août, les Allemands investissent massivement Dinant. La ville de Dinant est traversée par la Meuse. Sur la rive droite, domine à plus de 100 mètres de hauteur, l’imposante et majestueuse citadelle. Sur la rive gauche, domine la tour de Montfort.
Ces deux objectifs sont convoités par les troupes allemandes. Les 2 « bastions » sont défendus par le 148ème RI qui ne peut résister à une violente attaque. En fin de matinée, les Allemands en s’emparant d’eux, dominent le champ de bataille.
Le 33éme avait pris position en bas de la ville, le long de la voie ferrée et ce dès 5 heures du matin. Ordre leur est alors donné de reprendre, tout simplement, la citadelle et le fort.
Ah les ordres venus tout droit de l’imagination de gradés dignes de la guerre en dentelles ! Mais bon, les ordres sont les ordres !
S’élancent les 10ème et 12ème compagnies des capitaines Carton et Bataille.
La 10ème part violemment à l’assaut de la citadelle. Assaut rendu violent par l’impatience des troupes qui attendent depuis le matin de pouvoir, enfin, en découdre. Les Allemands surpris par tant de hargne, abandonnent la citadelle.
Leur commandement décide de réagir et soumettent la structure à un intense tir d’artillerie. Bombardement si violent qu’une partie de la citadelle s’effondre, engloutissant un grand nombre de vies, militaires et civils.
La 12ème, elle, au bas du fort de Montfort est « accueillie » par une pluie de mitraille qui laisse à terre la moitié de la compagnie et entraîne le repli des survivants qui font le triste constat de la réalité de la guerre.
Eh oui toi jeune et brave petit soldat. Tu t’en vins ici en intrépide guerrier…
Avant même d’avoir pris ta part de combat. Te voilà fauché au pied des fatals laurier.
La réalité ne laisse pas le temps de poétiser, la réalité du terrain s’impose.
Le lieutenant-colonel Stirn, décide alors d’envoyer des renforts, sans se soucier des pertes énormes qui se produiront.
Partir à l’assaut au départ de la voie ferrée, nécessite de franchir la Meuse par un pont (le pont de Dinant) qui comme goulot d’étranglement, offre aux tireurs allemands de parfaites cibles rouges à abattre.
L’ assaut est infructueux, le groupe verra la moitié de ses effectifs se faire massacrer avant que leur ordonne de se replier pour mettre fin à une de ces nombreuses hécatombes qui seront le quotidien du soldat envoyé au massacre dans de folles équipées si mal préparées par un état-major aveuglé par sa certitude, sa vanité de stratégies inadaptées, belles sur le papier, sans plus malheureusement !
Dans cette folle journée, un acte de bravoure fut signalé : lors d’une accalmie, les survivants qui pouvaient marcher quittent la citadelle pour rejoindre le régiment, laissant derrière eux les blessés sous la défense de 6 tireurs d’élite qui, à l’instar des défenseurs de Fort Alamo, luttèrent jusqu’à leur dernière cartouche et leur dernier râle de vie. Comment se nommaient-ils ?
La situation du 33ème allait tourner au désastre si au milieu de l’après-midi n’étaient arrivés, à marches forcées, les 8ème, 84ème, 110ème et 127ème RI, qui aidés par une forte artillerie, renversent la situation et font se replier les Allemands qui au passage exécutèrent de pauvres civils accusés d’avoir aidé les troupes françaises.
Au soir du 15 août, Dinant peut fêter la première victoire française sur le sol belge.
Hormis la victoire, le bilan du régiment est accablant au soir de l’Assomption : 605 tués, officiers, sous-officiers et soldats sur un effectif total de 3400 hommes ! On compte aussi plusieurs centaines de blessés. Premier assaut, premier massacre !
Parmi les blessés on note les noms de notre cousin, le capitaine Bataille et le lieutenant de Marenches, ami de Charles, qui l’accompagnait durant cette journée.
Il est vrai que moi, Marie-Agnès et mon mari auront à croiser son destin, et ce que je vais vous raconter je le tiens de Charles que j’ai rencontré les jours suivants !
Or Charles, comme une partie de son régiment se retrouve face à Dinant ce 15 août 1914. Et voilà ce qu’il nota dans ses carnets :
6 Heures du matin, boum-boum, la danse commence, l’ennemi bombarde Dinant avec fureur. Ce sont les premiers coups que nous recevons de la campagne !
Quelles impressions sur moi ? Pourquoi ne pas le dire ? Deux secondes d’émotion physique : gorge serrée et puis c’est tout! Je dois même dire qu’une grosse satisfaction s’empare de moi ! Enfin on va les voir !
En fin de matinée, le Lt Colonel Stirn donne l’ordre de quitter la citadelle. Les hommes de la 11ème Cie ne pensent qu’à une seule chose : en découdre ! La section commandée par le capitaine Bosquet est envoyée vers le pont de Dinant.
Deux secondes d’émotion physique, la gorge serrée. Et puis c’est tout ! La 11ème est appelée à intervenir, la baïonnette au canon, pour empêcher l’ennemi de passer le pont « sur les talons de nos compagnies massacrées ».
Je hurle ! 1ère section en avant avec moi ! Et je m’élance, conscient que notre seule chance de réussite est de faire très vite… J’ai l’impression que mon « moi » vient à l’instant de se dédoubler : un qui court comme un automate et un autre qui l’observe avec angoisse.
J’ai à peine franchi la vingtaine de mètres qui nous séparent de l’entrée du pont que je reçois au genou comme un coup de fouet qui me fait manquer le pied. Les 4 premiers qui sont avec moi sont également fauchés. Je tombe et le sergent Debout tombe sur moi, tué raide. Alors c’est une grêle épouvantable de balles autour de moi…
Je les entends rentrer avec un bruit sourd dans les cadavres et les blessés qui jonchent le sol ! Comment je n’ai pas été percé comme une écumoire durant le trajet.
Ce sera toujours le lourd problème de ma vie !
Mon frère rampe alors jusque la première maison, qui par chance est ouverte et il attend à l’abri la fin du crépitement des balles avant de se traîner à l’arrière. Il pense rejoindre le régiment stationné à Anthée, il a peur d’être pris par l’ennemi.
Le parcours pour un homme blessé n’est assurément pas chose aisée. Charles dut attendre la nuit pour être évacué du champ de bataille, son uniforme est plein de sang, il regarde la fin des combats, impuissant. Puis lors d’une accalmie, il est dirigé vers le château de Bouvignes 5 km plus haut sur la Meuse. La propriétaire Madame Ludovic Amand de Mendiéta y avait installé un hôpital militaire. Charles y reçoit les premiers soins.
Il est ensuite transféré au poste de secours à Anthée où le médecin principal Fasquelle qui l’avait ramené l’ausculte. Il juge son état compatible avec un transfert dans un hôpital mieux équipé afin de lui extraire la balle qui se promène dans sa jambe. Il est dirigé vers l’hôpital de Charleroi.
Mais Charles, durant son transfert à Charleroi décide de rejoindre la France, à Arras où se trouve caserné le 33ème et qui prend en charge ses blessés. Possibilité qu’avait évoquée le médecin qui savait qu’un train était en partance en fin d’après-midi.
Comme il le pense, durant le trajet en voiture vers le centre hospitalier, le risque d’être fait prisonnier par l’ennemi si on est hospitalisé à Charleroi n’est pas nul. Charles qui est un homme à l’esprit d’analyse stupéfiant et doté d’un esprit de décision rapide convainc ses compagnons de changer leurs plans et de regagner la France.
Je rentrais, moi sa sœur, de promenade avec mon petit Michel âgé d’un an. Nous étions un dimanche et il faisait beau. En rentrant chez nous, rue d’Assaut, je vois une voiture monter la rue et s’arrêter devant chez nous.
Le hasard fait que nous habitions à Charleroi car mon mari Alfred Cailliau, depuis 1910, y était ingénieur aux mines du Poirier. Le chauffeur était un jeune notaire de Philippeville, Paul le Boulangé aussi membre de la Croix-Rouge et qui, présent à Anthée, après avoir eu connaissance de leur décision, accepte d’emmener mon frère et ses camarades à la ville.
Dans cette voiture, je vis 3 officiers français dont Charles. La surprise pour moi fut, vous le pensez, autant insensée que rassurante, malgré sa blessure.
Il m’expliqua que tous trois avaient été blessés la veille à Dinant. Ils avaient la possibilité d’aller en gare de Charleroi afin d’y prendre le train pour retourner à Arras où ils seraient soignés.
Charles avait profité de cette coïncidence, qui faisait que nous habitions Charleroi, pour tenter de me rencontrer, a notre domicile rue d’Assaut. Le départ pour Arras étant indéterminé, ils partent en gare, je décide alors de confier mon enfant à la bonne et décide de courir rejoindre les 3 blessés à la gare du sud.
Sur le quai, en attendant l’embarquement, il me raconta sa journée de la veille, le train ne partit que 4 heures plus tard. Il dut s’allonger sur un brancard tant sa jambe le faisait souffrir. Il me montra ses notes sur son carnet et je l’encourageais à continuer à tenir son journal. Moi, je voulais le garder avec nous pour le soigner, mais il refusa net, vous le connaissez !
Comme lui, je me rendis alors compte des atrocités devant lesquelles nous allions.
Il me montra aussi le diagnostic de sa blessure : « Fracture du péroné par balle avec éclat dans l’articulation et atteinte du nerf sciatique. » Il essaya de me rassurer et son train finit par partir.
Un peu plus tard, Charles ausculté à nouveau à Arras est transféré à l’hôpital Saint-Joseph à Paris pour y subir une intervention chirurgicale afin d’y extraire la balle et résorber la fracture. L’opération se passe bien, mais il doit rester 3 jours sur un brancard dans un couloir, ce qui montre l’étendue du nombre de blessés de ce début de conflit.
Le professeur Michon, rassuré sur l’état du blessé qui n’a pas d’infection à la plaie (il craignait une gangrène vu le temps écoulé depuis la blessure), estime pouvoir l’envoyer à l’arrière pour consolider l’opération et envisager une rééducation. La raison principale était surtout de faire de la place aux blessés de plus en plus nombreux en provenance du front. Charles se retrouve transféré à l’hôpital Desgenettes de Lyon le 12 septembre.
Durant son séjour de près d’un mois à Paris, il a l’occasion de rencontrer les siens assez souvent. Il leur fait part de ses doutes sur la conduite actuelle de la guerre et les corrections à y apporte. On aura l’occasion d’en reparler.
Ma mère s’inquiète plus à la lecture du diagnostic : « Balle au creux du poplité droit (le creux à l’arrière du genou) avec parésie (paralysie partielle) du nerf sciatique. » Blessure qui, elle le suppose, va le handicaper plusieurs mois. Ce qu’elle vit, c’est que Charles souffrait énormément malgré ses propos rassurants. Son état s’améliorant mais sa jambe avait encore besoin de soins. Pour retrouver ses capacités, le professeur préconise massages et utilisation d’un traitement à la mode : emploi de décharges d’électricité pour rétablir les connections du nerf sciatique. Mais pour libérer de la place près du front, on l’oriente vers l’hôpital Desgenettes à Lyon.
Le mois à Paris, près des siens passa vite, le transfert se fit. Les adieux furent difficiles pour maman qui avait peur pour la vie de ses trois fils engagés sur le front. Le plus jeune suivrait-il ?
Durant son séjour à Lyon, pénible et douloureux, Charles n’a pu que constater les dures réalités de la guerre où l’Etat-Major, suffisant à souhait, n’a eu que peu d’égards pour la vie de ses soldats de par son manque de « lucidité. »
Il suit l’avancée du 33ème qui séjournait, fin août, en réserve près de Dinant à Weillen. Charles apprit le comportement odieux des « Boches » dans Dinant un peu plus tard. On commençait à les appeler ainsi de plus en plus. Le nom de « Boche » déjà utilisé en 1870 ; il venait de l’argot alsacien où une boche était une boule de bois dure et « al » le diminutif de Allemand. L’association d’un Allemand réputé ayant la tête dure (Al-boche) fera le reste.
Un rescapé raconta :
Le dimanche 23 août un peu avant 6 heures, le général Allemand Elsa, pas résigné par la victoire française du 15 décide de contre-attaquer dans Dinant. Il donne ordre, quelques jours après, au XIIème corps saxon d’artillerie et à leurs mitrailleuses d’ouvrir le feu avant la montée au combat des fantassins. Les Allemands qui ont eu vent de la liesse qui avait suivi l’entrée des Français dans la ville, soupçonnent les habitants d’avoir aidé à obtenir ce résultat.
Voyons les faits : Le 21, certains uhlans ivres, étant attaqués, et manquant de discernement avaient tiré sur tout ce qui bougeait. Des civils tombent et même certains de leurs camarades soldats, crois-t-on !
Le 22, 2 à 3000 civils, normalement apeurés, décident de se réfugier derrière les lignes françaises. Hélas, les Français avaient piégé le pont et l’avaient habillé de fils barbelés. De dépit, ils se réfugient où ils peuvent, y compris dans les caves.
Et le 23 à 6 heures du matin, le général fait ouvrir le feu par l’artillerie du XIIème corps saxon. Avant de partir à l’assaut, ils reçoivent de leur commandant l’implacable mot d’ordre de : piller, incendier, massacrer sans égard à l’âge et au sexe !
Quelques verres de schnaps après, les fantassins s’enfoncent dans les rues de la ville. Ils atteignent le centre-ville et les faubourgs des quartiers populeux de Saint-Nicolas et de Neffe. Ils inaugurent alors une série d’immondes massacres.
En 3 ou 4 heures, les habitants sont extirpés de leurs caves et abris à coups de baïonnettes et de crosses de fusils. Les coups, brimades et exécution sommaires se déroulent en plus de 20 endroits dans la ville.
Se distingue, le long du mur de Mr Tschoffen dans le quartier de Saint-Nicolas, le lieutenant-colonel Kielmannsegg, de par sa macabre imagination ! Il fait aligner sur 4 rangées plusieurs dizaines de suspects de collaboration avec les troupes françaises et improvisant un peloton d’exécution les fait abattre sous les yeux de leurs proches. Comble de l’horreur, dans un accès de folie, il achève, bave aux lèvres, les fusillés agonisant à coups de pistolet.
Puis quai du rivage, les soldats allemands pris sous le feu des mitrailleuses françaises se servent des civils comme boucliers avant de battre en retraite.
Un peu plus tard, les sinistres fantassins du 101ème régiment d’infanterie du sinistre Kielmannsegg, voulant installer un pont de fortune sur la Meuse, subissent la mitraille des Français. Comme ils ne peuvent réaliser leur plan et fous de rage, ils s’emparent de civils et les exécutent en guise de représailles. Ceci près du Rocher Bayard, le long du mur de la famille Bourdon. Parmi les victimes, des femmes ayant des enfants dans les bras et aussi des adolescents.
Le comble de l’horreur est la scène où l’on vit un bébé de 3 semaines embroché au bout d’une baïonnette et promené comme un trophée dans les rues, Mariette Finet était son nom !
Et leurs crimes continueront une grande partie de la nuit à coups de feu et de grenades.
Leur contre-attaque fut un succès, c’est malheureusement le mot approprié dorénavant, les Français se replient sur Charleroi et Philippeville.
Après Namur, les forts de Liège et Namur tombent. La vallée de la Meuse est dominée par les Allemands.
Peu après, à Dinant, la décomposition, la putréfaction et l’odeur abominable des cadavres amène les Allemands à allumer d’énormes buchers pour y faire disparaître les monceaux de cadavres.
Après le départ des Français les massacres se calment mais durant plusieurs jours, des patrouilles accompagnées de bergers allemands fouillent les immeubles, des exécutions sommaires se poursuivent au petit bonheur la chance. L’ampleur des dégâts est considérable. On parle de 10%, 20% (plus ?) de disparus. Entre 500 et 1000 victimes ?
Le bilan se fera plus tard ! La moitié de la ville est détruite.
L’homme qui relata ces événements à Charles à l’hôpital Desgenettes avait les larmes aux yeux ! Avait-il été personnellement affecté par ce drame ? Charles n’osa lui demander. Il ne le saura jamais !
Charles s’intéressa à la suite de l’épopée du 33ème.
Après le repli en bon ordre de Dinant, les Allemands progressent vers Charleroi.
Le régiment part à la rencontre de l’ennemi. Là ils virent la sauvagerie des « Boches » qui incendient plus de 10 villages et affolent les populations qui partent en exode avec tout ce qui roulait. Le régiment est constamment harcelé par des petits groupes d’uhlans.
Après une semaine de marche, on campe à Houset et on reçoit l’ordre de rencontrer l’ennemi à Sains-Richaumond.
Attaque frontale, impitoyable, on reprend les 2 places de Stains et Richaumond. Mais les Allemands se ressaisissent ! Jusqu’au 31 août, ce furent des combats acharnés.
En ce début de guerre, les combats se font sans retenue, à la manière des soldats de l’an II. Au final, aux dires des blessés, ce fut pour les Allemands autant de jours perdus pour la marche sur Paris. Maigre consolation !
Le 33ème, bat encore en retraite et se retrouve à 10 km de Sézanne, à Fontaine-Denys, soit à 40 km au sud de Reims courant septembre où il stationnait encore à-priori quand Charles apprit alors que vu l’amélioration de son état, il était transféré à Cognac en convalescence. Mais les événements de septembre, on en reparlerait.
Ainsi se termine le premier récit consacré au 33ème R.I entrant en campagne en ce mois d’août 1914.
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