croquis perspectif Bois d'Ailly

Bois d'Ailly

Chronologie sommaire de la 2ème D.I :

  • 29 avril – 11 mai Mouvement vers le front : 30 avril attaque au Bois d’Ailly puis occupation d’un secteur dans ce bois
  • Le 05 mai attaque allemande et contre-attaque française
  • 11-15 mai retrait du front et transport par V.F dans les régions d’Epernay et de Fismes

Avant-propos

Les caractéristiques de cette année 1915 seront chez les Alliés, comme en 1914, le défaut d’unité de direction et une certaine hésitation dans l’application des nouvelles méthodes de guerre qui s’imposaient à la suite de l’apparition de ces deux faits.

La victoire de la Marne, complétée par les batailles des Flandres et de l’Yser, avait brisé le plan militaire allemand. Toute la conception de l’État-major de Berlin était fondée sur une décision rapide de la guerre par l’écrasement successif de la France et de la Russie ; elle échouait devant la magnifique réaction de l’armée française, appuyée par l’intervention de l’Angleterre et la résistance de l’héroïque Belgique. L’entrée en ligne de la Russie, beaucoup moins retardée que ne l’avaient supposé les stratèges allemands, exerçait, dès le mois de septembre, une action très efficace en Pologne et en Galicie. Ces événements imprévus forçaient l’Allemagne à reprendre de nouvelles directives, tant militaires que politiques. Et les batailles de septembre, d’octobre et de novembre 1914 avaient pour conséquence immédiate de mettre l’Allemagne sur une défensive momentanée. On comprend que les Alliés victorieux aient pu alors se faire illusion sur la durée de la guerre. L’année 1915 apparaissait comme devant amener la fin de la guerre. Si, parmi les belligérants, les expressions de « guerre lente, guerre d’usure » commençaient à se répandre, aucun n’avait encore prévu la forme nouvelle qu’allait prendre la guerre.

Le front occidental

Sa physionomie au début de l’année

Au début de 1915, le front occidental se trouve dans une période de calme apparent. Les combattants sont occupés, de part et d’autre, par la préparation des tranchées et abris qui leur permettront de supporter, dans les meilleures conditions possibles, la « guerre d’usure ». Les armées prennent, comme jadis, leurs quartiers d’hiver. En effet, depuis les batailles de la Marne et de l’Yser, la guerre se présente, sous une forme extraordinaire, sans exemple dans l’histoire militaire. Les Allemands et les Alliés semblent avoir épuisé leur force offensive et, se fixant sur les positions dont ils n’ont pu se débusquer mutuellement, ils développent successivement et parallèlement une immense ligne de circonvallation réciproque, le long de laquelle ils se guettent et s’assiègent mutuellement. De Nieuport à Belfort, il n’y a plus un point par lequel pourrait passer librement un cheval. Des triples et quadruples rangées de tranchées profondes, pour lesquelles la science un peu périmée de la fortification de campagne a retrouvé et déployé toute son ancienne ingéniosité, découpent le sol, utilisant et renforçant tous les obstacles et abritant des combattants toujours à l’affût et tellement rapprochés les uns des autres que le tir se fait pour ainsi dire à bout portant. Derrière ces lignes de tranchées d’infanterie, à plus ou moins grande distance, enfoncés dans des excavations, dissimulés sous des couverts de branches et de paille, les canons échangent leurs projectiles, et le fracas ininterrompu des explosions domine les crépitements de la mousqueterie.

Un endroit sur cette longue ligne de tranchée va cristalliser les convoitises des Français dès fin 1914.

Il s’agit du secteur de Saint-Mihiel qui forme saillie sur une ligne virtuelle de Verdun à Nancy.

Outre ce souci d’harmonie géographique, ce secteur était un véritable enjeu stratégique.

La proximité du camp retranché de Metz est évidemment une des raisons qui ont permis aux Allemands de se maintenir à Saint-Mihiel et de nous empêcher de réduire le saillant ainsi formé dans notre front.

De temps à autre, plusieurs fois par semaine, souvent même plusieurs fois par jour, des compagnies, des bataillons sortent des tranchées, s’élancent et, à travers les fils de fer barbelés, essaient de s’emparer des tranchées ennemies. L’artillerie a préparé l’attaque par un bombardement violent. L’attaque réussit ou échoue devant la résistance et sous le feu du défenseur. Une contre-attaque énergique ramène les assaillants en arrière et ainsi se produit une alternance d’avances et de reculs, de tranchées prises et reprises, de bois, de villages et de fermes âprement disputés. Combats locaux qui paraissent sans liaison les uns avec les autres et qui pourtant obéissent à un plan d’ensemble dont le double objectif est de forcer le barrage ennemi et de garder le sien.

Les tranchées et le "Saillant de Saint-Mihiel."

Carte 1 : Les tranchées et le « Saillant de Saint-Mihiel. »

L’obsession de l’Etat-Major français, encouragé par le Gouvernement et l’opinion, était de libérer le territoire. En 1914, domine chez les Français, l’esprit d’offensive. Pour bouter l’ennemi du territoire plusieurs plans d’attaque vont se succéder : Artois et Champagne, principalement, pour début 1915.

Mais le conflit s’internationalise et on fonde beaucoup d’espoir avec l’entrée de la Russie dans le conflit.

Seule la bataille de Champagne intéressera le 33ème R.I.

La première Bataille de Champagne (Février-mars 1915)

Cette bataille fut engagée afin de retenir en Occident les troupes allemandes qui s’y trouvaient et de les empêcher d’aller renforcer le front oriental. Il fallait soulager nos alliés russes fortement attaqués par le groupe Hindenburg. Il n’est pas douteux aussi que le commandement se faisait encore des illusions sur la solidité des tranchées allemandes et sur les procédés nouveaux qui allaient s’imposer à l’attaque. Le commandement choisit, pour cette première offensive, la vaste plaine ondulée de la Champagne, parsemée de petits bois qui deviennent plus épais à mesure que l’on se rapproche des crêtes dominant la vallée de l’Aisne. L’objectif était la ligne même de l’Aisne, dans la grande boucle qu’elle décrit entre Vouziers et Rethel.

L’action débuta le 15 février et prit aussitôt le caractère d’une bataille acharnée sur la ligne Souain — Perthes-lès-Hurlus — Beauséjour.

Nos troupes avancent le 16, le 17 et le 19 malgré un temps épouvantable et une résistance allemande qui avait été largement sous-estimée.

La première bataille de Champagne, dont la période active s’étend du 15 février au 20 mars, se traduisit, sur un front de 7 kilomètres de long, par une avancée de 3 kilomètres en profondeur par rapport à nos positions de décembre. Bilan un peu embelli vu la fragilité des positions françaises.

*Source gallica.bnf.fr / Bibliothèques de la Ville de Compiègne Général Malleterre. Les Campagnes de 1915, le front occidental en 1915, le front russe, les fronts turcs, le front […]

*

Les Batailles secondaires de 1915 (secteur Nord-Est)

L’Etat-Major de Joffre, pour appuyer ce « Front Principal de Champagne » va développer plusieurs fronts dits secondaires destinés à fixer les troupes allemandes et les empêcher de renforcer le front de Champagne.

N’était néanmoins pas exclu de profiter d’une éventuelle percée en un point ou l’autre de cette ligne de tranchées.

Parmi ces fronts, tous n’intéressent pas directement le 33ème R.I.

I. – L’affaire de Soissons (8-15 janvier)

II. – Craonne-Hurtebise (27 janvier)

III. – La prise de Vauquois (17 février-6 mars)

IV. – Les Éparges, Saint-Mihiel (17 février-12 avril)

V. – La Bataille de la Woëvre (5-11 avril 1915)

VI. – Le Vieil-Armand en Alsace (25 février-26 mars)

VII. – Le Bois d’Ailly (29 avril – 15 mai)

La Bataille de la Woëvre (5-11 avril 1915)

(Voir article précédent)

En envoyant au général Dubail son rapport sur les dernières attaques du 12 avril, le général Gérard lui exposait la façon dont il envisageait alors la situation.

« Dans les attaques du 5 et 6 avril, on avait recherché la surprise. L’échec était dû à l’état du terrain détrempé par les pluies qui avaient empêché la progression de l’infanterie, les déplacements et les tirs de l’artillerie. L’effet de surprise et les efforts pour l’exploiter n’avaient pas compensé les défectuosités de la préparation dues à sa rapidité. »

Par la suite, le général Gérard avait voulu concentrer tous ses moyens sur un front de quatre kilomètres, entre Pareid et Maizeray, et y faire une attaque violente après une puissante préparation d’artillerie. Malgré le soin apporté à la préparation d’artillerie et la qualité des troupes engagées*, choisies parmi celles qui s’étaient le plus affirmées en Champagne, l’attaque exécutée le 12 avril n’avait pas eu de succès à cause de l’insuffisance des résultats obtenus par l’artillerie, d’un temps exécrable et d’une précipitation d’engagement des troupes. Le bilan laissait à désirer !

Ces médiocres résultats, dans le rapport du Général Gérard, provenaient essentiellement de la solidité des organisations défensives allemandes, beaucoup plus fortes que prévues en Champagne. Une période de stagnation absolue de six mois avait permis aux Allemands l’établissement de lignes profondes et successives qui pouvaient être défendues efficacement par des effectifs bien inférieurs à ceux de l’attaque.

La précipitation et l’inconséquence du Général Gérard qui rêvait de gloire au mépris de la vie de ses soldats étaient les raisons essentielles mais jamais énoncées ni dénoncées.

Il était évident qu’à continuer dans cette région on risquait d’une part de ruiner sans résultat une infanterie excellente et de lui enlever sa confiance, d’autre part, de gaspiller des munitions sans rendement suffisant.

*Parmi ces troupes se trouvait le 33ème Régiment d’Infanterie.

*

La fin des opérations de début d’année (Avril 1915)

Le 14 avril, les attaques de cette campagne de fin d’hiver, vont tour à tour s’arrêter et les unités vont être redéployées dans un nouveau schéma général.

Pendant cette période de réorganisation du 14 au 17 avril, les Allemands contre-attaquèrent violemment en plusieurs endroits : au Bois de Mort-Mare, au Bois d’Ailly et aux Eparges mais furent à chaque fois repoussés.

Le 23 avril, le détachement Gérard était dissous et retiré du front.

Le groupe des armées de l’Est allait subir une réorganisation ;

Le Général Roques reprenait alors la conduite de l’ensemble des opérations dans son secteur*, le saillant de Saint-Mihiel en étant la plus grande partie.
Celles du Bois d’Ailly passant de fait sous sa responsabilité.

Tout en restant une composante du « Groupe des Armées de l’Est » du Général Dubail bien entendu.

Le groupe des armées de l’Est, sous le commandement du général Dubail comprend (Carte 3) :

  • A l’aile gauche, dans le secteur des Hauts de Meuse :
    • La 1ére armée française (général Roques) en face de l’autre partie de l’armée du Kronprinz et du détachement d’armée Von Stranz. (où interviendra le 33ème R.I)
  • Au centre, dans le secteur de Lorraine :
    • Le détachement d’armée Humbert en face du détachement d’armée Von Falkenhansen.
  • A l’aile droite, dans le secteur de l’Alsace :
    • Le détachement d’armée des Vosges (général Putz) en face du détachement d’armée Von Gaede. Les forces en présence sont de 15 corps d’armée environ.

Le 33ème Régiment d’Infanterie se verra rattaché fin avril au dispositif de La 1ére armée du général Roques. Nous le verrons plus loin !

« Le général Roques reprend la direction de l’ensemble des opérations sur son ancien front et il lui appartiendra d’organiser le commandement dans les secteurs d’attaque. » (Général Joffre)

L’organisation des armées de l’est

Carte 3 : L’organisation des armées de l’est

Les nouvelles orientations dans le saillant Saint-Mihiel

En Champagne, les opérations avaient été arrêtées. Les attaques sur d’autres fronts continuaient Les opérations pour réduire le « Saillant de Saint-Mihiel » allaient commencer.

Le Général Joffre approuva les propositions du Général Dubail de concentrer les efforts sur 2 fronts.

  • Un secteur Nord, à Combres-sous-les-Côtes – Les Eparges et
  • Un secteur sud entre le Bois d’Ailly et le Bois Le Prêtre. (Carte2 et Carte 4)

Entre ces 2 zones, s’étendait une zone nettement défensive qui s’étendait du Bois d’Ailly à la Tranchée de Calonne soit entre Combres et Saint-Mihiel.

Le saillant Saint-Mihiel d'octobre 1914 à septembre 1918

Dans le secteur sud, les directives du Général Dubail faisaient de Régniéville (carte 5), l’attaque principale.

Rapidement, le Bois d’Ailly, de front secondaire devint une priorité à poursuivre vu les progrès qui semblaient s’accentuer et les déboires aux Bois de Mort-Mare et Bois Le Prêtre.

« En tout cas : C’est bien par le bois d’Ailly qu’il faut continuer à pousser, puisque le point cède peu à peu : le succès pourrait être d’une application immédiate et produire un excellent effet sur l’opinion publique, » déclara le Général Dubail* (cette déclaration du 22 avril intervint après les événements du Bois d’Ailly… à voir plus loin).

Le général Dubail indiqua ainsi au Général Roques que l’exploitation des succès du bois d’Ailly était la seule et unique opération à mener pour le moment par la 1ère armée.

Après avoir fait un inventaire des troupes disponibles, on amena à retirer progressivement le 1er Corps du 33ème pour être mis en réserve pour les opérations futures de la 1ère Armée du Général Roques. Le 1er Corps fut retiré définitivement le 22 avril.

Le 33ème Régiment d’Infanterie se verra rattaché fin avril au dispositif de La 1ére armée du général Roques. Nous le verrons plus loin !

*Source gallica.bnf.fr Dubail, Edmond (1851-1934). Quatre années de commandement, 1914-1918 (1re armée, groupe d’armées de l’Est, armées de Paris) : journal de campagne / Général Dubail. 1920-1921 Citation du 24 avril 1915.

Attaque principale : Secteur de Régniéville

carte 5 : Attaque principale : Secteur de Régniéville

La tranchée de Calonne

carte 4 : La tranchée de Calonne

Le 23 avril, le Général Dubail avait la responsabilité de l’ensemble des opérations du Grand Est, le Général Roques qui reprenait la conduite de l’ensemble des opérations dans son secteur, étalait ses ambitions de conquête :

Le général Roques se grisait des succès obtenus ces jours derniers. Il proposa au général Dubail d’exploiter les succès obtenus par le 8e corps au Bois d’Ailly. Mais… Pendant cette période de réorganisation, les Allemands contre-attaquèrent violemment au Bois d’Ailly, au Bois de Mort-Mare et aux Eparges mais furent chaque fois repoussés !

Le 24 avril 1915 :

Mais…..Dans la nuit du 23 au 24, au Bois d’Ailly, les Allemands procédèrent à plusieurs contre-attaques! Neuf ont été repoussées successivement, une dixième a fait refluer nos troupes de 75 mètres des deux côtés du point 1 (corne nord-ouest du bois), dans le boyau qui longe la lisière. Tout le reste de notre gain antérieur a été maintenu. Le général Blazer a fait reprendre l’attaque sur le point 1 et l’a réoccupé. (Carte 6 et carte 6bis)

Bois d'Ailly : l’attaque du 24 avril 1915

Carte 6 : L’attaque du 24 avril 1915

Bois d'Ailly : l’attaque du 24 avril 1915

Carte 6 bis : L’attaque du 24 avril 1915

Les actions dans les Eparges :

Dans le secteur Nord, la situation avait été profondément modifiée par l’occupation des Eparges, suite à une campagne menée du 17 février au 12 avril 1915. Les allemands avaient de fait perdu un observatoire de première importance.

Les Allemands ne se résolurent pas à la perte de la colline des Eparges !

Depuis le 20 avril, divers indices faisaient prévoir une attaque par les Allemands ans le secteur de Saint-Mihiel. Des nuages de poussière de la route Chaillon – Saint-Mihiel, attestaient d’un afflux de troupes ennemies. Les 21 et 22 l’ennemi avait bombardé avec plus de violence et les tirs étaient principalement dirigés vers nos secondes lignes.

C’est le troisième jour que les Allemands bombardent avec cette intensité, sans qu’aucune attaque d’infanterie ne se produise.

En raison de l’inaction des Allemands, depuis 24 heures, de fortes patrouilles ont été envoyées sur tout le front. Partout, l’ennemi a été trouvé vigilant !

Le 23 avril, vers 20 heures, les Allemands attaquèrent aux Eparges. Ils prirent pied dans un saillant de nos lignes, mais en furent immédiatement chassés par une contre-attaque.

Le 24 au matin, le bombardement reprit avec une intensité croissante jusqu’à midi: « de midi à 13 heures, il fut formidable». Sur les premières lignes, il était exécuté surtout avec des torpilles.

L’attaque était imminente, les troupes sur place de la 12ème Division du Général Herr se massèrent dans les premières et secondes lignes afin d’empêcher l’ennemi de progresser entre les 2 lignes. Une contre-attaque fut même envisagée !

A 13 heures, le feu cessa et l’infanterie ennemie, attaquant de part et d’autre de la Tranchée de Calonne, enleva notre première ligne sur un front de quatre kilomètres, la deuxième sur un front de 800 mètres. Elle parvint jusqu’à nos positions d’artillerie où elle s’empara d’une batterie de 75 et de seize pièces de calibre supérieur.

Les contre-attaques immédiates menées par les réserves de secteur ne purent qu’arrêter l’ennemi, qui, le 24 au soir, tenait une ligne générale contournant par l’est et le sud la cote 340, passant au carrefour de la route Mouilly, Saint-Rémy et de la Tranchée de Calonne et à la tête du ravin séparant le Bois Loclont et le Bois Bouchot.

Cette attaque fut déclenchée le 25 avril vers midi parallèlement et de part et d’autre de la Tranchée de Calonne. Elle put progresser d’environ 150 mètres. (Carte 7)

Mais à 15 heures, les Allemands attaquèrent sur notre gauche, contre les lisières sud-est du Bois Haut; ils s’infiltrèrent par le ravin de Genousevaux, firent tomber la cote 340 et pénétrèrent dans le Bois Haut jusqu’aux abords du Central Calonne. Presque en même temps, nous repoussions une violente attaque aux Eparges.

L’attaque du 24 avril 1915 route de Mouilly-St Rémy

Carte 7 : L’attaque du 24 avril 1915 route de Mouilly-St Rémy

L’attaque du 25 avril 1915 aux Eparges

Carte 8 : L’attaque du 25 avril 1915 aux Eparges

Le 25 avril, le général Roques rendit compte au commandant en chef qu’il n’avait plus de réserves et que ses effectifs étaient encore inférieurs à ceux de l’ennemi. Le général Joffre lui répondit de s’adresser au général Dubail. Celui-ci, sachant qu’il s’agissait d’une grande attaque visant spécialement les Éparges demanda que la 2ème division de se préparer à s’embarquer pour être remise à la disposition du Général Roques. La 2e division fut transportée à Commercy et mise à la disposition de la 1ère armée.

Le général Dubail indiqua bien que la 2e division ne fût pas engagée à la tranchée de Calonne, mais qu’elle servît à exécuter une vigoureuse riposte au Bois d’Ailly.
Le Bois d’Ailly passa progressivement de front secondaire à front principal.

Les combats aux Eparges et à la Tranchée Calonne se poursuivirent encore de longues journées, ce furent ces différentes attaques qui feront que :

Le 33ème ira lui dans le secteur du Bois d’Ailly.

croquis perspectif Bois d'Ailly

Croquis 9 provenant du Journal de Marche du 56ème R.I

Les actions dans le secteur sud : Bois d’Ailly.

En tout cas, « C’est bien par le bois d’Ailly qu’il faut continuer à pousser, puisque le point cède peu à peu : le succès pourrait être d’une application immédiate et produire un excellent effet sur l’opinion publique. » Général Dubail avril 1915.

L’enlisement aux Eparges explique donc la mise à disposition de la 2ème division à la 1ére armée du général Roques.

fronts d'attaque

Carte 10 : En pointillés sont représentés les fronts d’attaque des lignes françaises, en rouge et en bleu pour les allemandes.

La situation au Bois d’Ailly (carte 11 -dessin- et carte 12)

Dès septembre 1914, la prise du Bois d’Ailly (bois situé à l’est de Saint-Mihiel) a constitué un des objectifs principaux des attaques françaises. L’occuper c’était tenir sous son feu St-Mihiel et les routes qui y conduisaient.

Ce bois, situé dans la région de Saint-Mihiel, s’étend à l’extrémité Nord-Ouest de la forêt d’Apremont. Il est planté sur une croupe dont les pentes sud, assez raides, surplombent un ravin. Les Allemands tenaient la corne de cette croupe et les lisières du bois au bas des pentes. Nos tranchées suivaient le ravin en remontant sur la partie déboisée de la colline. A la corne, les ennemis avaient organisé un retranchement très bien défendu, que nos hommes avaient baptisé « le Fortin ». Dans le bois même, leurs tranchées s’étageaient sur trois lignes de feu communiquant avec l’arrière par une série de boyaux.

S’installer sur ce bois ne serait pas une « affaire » des plus faciles.

Dessin des environs du Bois d’Ailly (JMO 56ème R.I)

Carte 11 : Dessin des environs du Bois d’Ailly (JMO 56ème R.I)

Le Bois d’Ailly (depuis le début du conflit)

Le 13 septembre 1914, le 8ème corps quitte la Lorraine pour les Hauts de Meuse. Le 29 septembre, le 56e, commandé depuis le début du mois par le Lieutenant-Colonel Garbit, défend les pentes sud-ouest du bois d’Ailly.

Il restera dans ce secteur fameux jusqu’au 25 septembre 1915, toujours en première ligne, barrant à l’ennemi la route de Commercy par une lutte de chaque jour, de chaque nuit, lutte au couteau, à la grenade, d’homme à homme, sous une avalanche journalière de 210 et de torpilles telle, que plus tard, à Verdun, lorsque l’enfer tonnera aux portes de Souville, les vieux du bois d’Ailly sauront… ne pas trembler.

Au cours de cette période héroïque, l’ennemi n’a pu enlever un pouce de terrain gardé par le 56e, et par contre, toutes les attaques menées par le Régiment nous ont donné le succès, ou ont été poussées jusqu’au sacrifice. Au mois de juin 1915, le général Victor Cordonnier* présentant le Régiment au Président de la République, pourra dire : « Le 56e, c’est ma garde ».

Extrait Historique du 56ème Régiment d’Infanterie

Opérations du 56 sur les Hauts de Meuse

Carte 12

Les attaques d’avril 1915 :

Les attaques du Bois d’Ailly viennent en soutien à l’offensive principale que représente la « Bataille de Champagne ».

A la corne, les ennemis avaient organisé un retranchement très bien défendu, que nos hommes avaient baptisé « le Fortin ». Dans le bois même, leurs tranchées s’étageaient sur trois lignes de feu communiquant avec l’arrière par une série de boyaux. (carte 12)

Après plusieurs jours d’une énorme préparation d’artillerie, le 05 avril 1915, les Français partirent à l’assaut pour conquérir le Bois d’Ailly. Jusque fin avril, ce fut un combat épouvantable, ce bois devint un véritable charnier.

« Depuis plusieurs jours, notre artillerie avait réglé son tir. »

Le 5 avril, dans la matinée, elle exécuta sur le Fortin et les trois lignes de tranchées des feux dont l’efficacité fut constatée. En même temps que les obus explosifs du 75 et de l’artillerie lourde, les torpilles aériennes lancées à courte distance bouleversaient les parapets ennemis. On voyait des cadavres déchiquetés, des armes et des mottes de terre projetés en l’air avec la fumée des explosions.

Du Bois d’Ailly, ou plutôt de ce qui avait été le Bois d’Ailly, il ne restait plus que de rares troncs coupés à quelques décimètres du sol. C’était un véritable champ de souches moissonnées par les obus. Pas un centimètre de terrain qui n’eût été retourné par l’artillerie.

Dans un indescriptible chaos s’entremêlaient les choses les plus diverses.

Des pierres, des armes, des cadavres, étaient entassés pêle-mêle. Ici on apercevait des débris de boucliers, là des gabions éventrés, plus loin des effets d’équipement ; partout, une couche de poussière grise recouvrait tout cela en lui donnant une teinte uniforme.

Cette région fut, pendant que dura cette affaire, un véritable enfer ; et cependant, malgré cet ouragan de mitraille, nos hommes s’y étaient héroïquement maintenus. Il n’y avait plus d’abris : tous avaient été détruits par l’artillerie. Les tranchées étaient en partie comblées, les parapets s’écroulaient, les boyaux étaient coupés ; et, cependant, les agents de liaison passaient, transmettant les ordres, et les brancardiers, parmi lesquels de nombreux prêtres, impassibles sous la pluie de fer, emportaient les blessés.

Les obus tombaient sans interruption. On voyait des hommes courir de place en place pour éviter des points battus. Ailleurs ils s’étendaient, couchés sur le ventre, au fond de la tranchée, protégés par leurs sacs et serrés les uns contre les autres.

Le 10 avril, nos canons exécutèrent, du matin au soir, un tir réglé sur les positions que nous allions attaquer. L’assaut ne fut lancé qu’à 7 heures du soir.

Deux bataillons y prirent part, en se portant dans des directions convergentes, et eurent vite fait, cette fois, d’occuper la position en entier.

Nous y trouvâmes un nombreux butin : des mitrailleuses, des milliers de grenades à main, des armes, des cartouches, des équipements.

L’ennemi contre-attaqua violemment 10 ou 12 fois jusqu’au 23 avril mais ne reprit qu’une très petite partie de terrain conquis depuis le 05.

Vers la fin avril, les Français pouvaient annoncer : « Les Allemands sont dès lors bien convaincus de notre supériorité dans ce secteur ! »

*

Les offensives de 1915 bois d'Ailly et forêt d'Apremont

Carte 13 : Source « Mémoire des Hommes »

Mais le 24 avril, le général Dubail au petit matin, est informé qu’une nouvelle contre-attaque allemande a réussi, cette nuit, à nous rejeter de la tranchée (dite grise), conquise, hier, dans la partie occidentale du Bois d’Ailly. (Carte 13)

On lui annonce également un assaut sur les Eparges (ce que nous avons vu plus haut).

Un peu plus tard, on lui apprend qu’à la Tête-de-Vache, les Allemands reprennent le terrain conquis les jours d’avant.

Dubail dans la matinée de ce 24, à 8h30 se rend au Q.G du Général Roques pour analyser la situation.

On s’entend sur l’énergique impulsion à donner aux attaques de la Tête-à-Vache et surtout du Bois d’Ailly, « qui me parait être, en ce moment, un point faible de l’ennemi ». Et ce malgré les événements de la veille.

Le général est décidé à pousser à fond de ce côté. Un plan est conçu à la hâte !

Le général Roques anticipant le succès qu’il entrevoit déjà, a alors l’intention, dès qu’il sera solidement établi à la corne nord-ouest du bois d’Ailly, d’élargir, vers le nord-ouest, sa base d’attaque, en terrain libre, dans la direction d’Ailly et même de s’emparer de ce dernier village. Les autres attaques importantes du nord et du sud, seront encore considérés être dans une période de préparation.

Cependant l’Etat-Major doit tenir compte d‘une donnée incontournable dont le Général Dubail a eu connaissance et dont il doit référer aux unités du secteur :

« La question des munitions domine toute la situation. Avec sa dotation actuelle, le général Roques ne peut alimenter l’offensive que dans la forêt d’Apremont. Les autres attaques seraient-elles archi-prêtes, qu’il serait forcé de les sérier. Il vient lui demander que ses allocations soient au moins doublées; je ne puis qu’appuyer fortement ce désir, si la situation générale de nos approvisionnements ne s’y oppose pas. »

C’est à cette occasion qu’il déclara aussi : « En tout cas, c’est bien par le Bois d’Ailly qu’il faut continuer à pousser, puisque le point cède peu à peu : le succès pourrait être d’une application immédiate et produire un excellent effet sur l’opinion publique. »

Cette révélation sur l’état des stocks d’obus limite de fait l’ambitieux plan du Général Roques !

Le soir, Dubail apprendra que les Allemands ont à nouveau attaqué sur la tranchée de Calonne. « Ils ont pris notre première ligne sur près de quatre kilomètres de front, atteint et dépassé notre deuxième ligne, des deux côtés du carrefour de la tranchée et de la route Mouilly, Saint-Rémy. »

C’est ce qu’il nomma dans ses mémoires comme étant : « La surprise du 25 ». (Carte 7)

Conformément à ces directives, le général Roques mit la 2ème division à la disposition du 8ème Corps d’Armée du Général de Mondésir pour renforcer la 15ème division au Bois d’Ailly.

Le Général Dubail se rendit dans la matinée du 27 avril à la 1ère armée pour s’entendre avec le général Roques sur l’emploi de cette division.

« En vue de donner un très grand développement aux attaques actuelles dites du Bois d’Ailly . L’attaque ainsi développée était à préparer immédiatement de manière à pouvoir être déclenchée dans le délai le plus bref possible » Général Dubail.

Le 29 avril, la 1ère armée reprendrait l’offensive sur tout son front.

*

Le Rôle du 33ème R.I dans la Bataille du Bois d’Ailly

Le Bois d’Ailly

Carte 14 : Situation du Bois d’Ailly et de Commercy

Les 20 et 21 avril 1915, le Régiment se retrouve à l’arrière à Lemmes (voir carte n° 15)

Le Régiment reçoit 2 renforts les 9ème et 10ème de

  • 1er renfort : 2 officiers et 316 hommes
  • 2ème renfort : 1 officier et 207 hommes

Soit 3 officiers et 523 hommes, dont le Commandant Cordonnier venu remplacer le Commandant Deshayes blessé le 06 avril.

Le Commandant Henri Cordonnier* vient prendre le commandement d’un Bataillon.

*Le commandant Henri Cordonnier n’a pas de lien de famille avec le Général Victor Cordonnier précédemment cité.

Nouvelle organisation du 33ème Régiment d’Infanterie :

  • Le 1er Bataillon est dirigé par le Capitaine Charue
  • Le 2ème Bataillon par le Commandant de Bruignac
  • Le 3ème Bataillon par le Commandant Cordonnier

Les jours suivants seront occupés à intégrer ces nouvelles recrues, jeunes hommes de 20 ans à peine pour la plupart et qui vont se former avant de monter à leur tour à l’assaut. Cette classe 1915 pleine de fougue et ayant envie d’en découdre comme le remarquaient ceux qui avaient déjà subi tant d’assauts et de souffrances !

Carte de la position du 33ème le 20 avril 1915.

Carte 15 : La position du 33ème le 20 avril 1915.

Le 22 avril 1915 :

Alors qu’ils sont au repos dans le cantonnement, les soldats du Régiment sont appelés à prendre part à une « Parade d’exécution » concernant des hommes du 8ème et du 73ème R.I.

Il s’agissait de dégradations militaires et non d’exécutions comme celle qui avait concerné le soldat Cailleretz Charles du 8ème R.I exécuté le 03 avril pour abandon de poste devant l’ennemi et auto-mutilation le 07 mars 1915 alors que les troupes étaient à bout, contrairement à toutes les appréciations notées sur les J.M.O mentionnant que le moral était excellent.

Exécution suivie de celle de Joseph Delplanque soldat du 110ème R.I exécuté le 20 avril pour abandon de poste et automutilation tout comme le soldat Cailleretz.

Les compte-rendus du Docteur Dury reproduits ci-dessous ont une ressemblance qui laisse perplexe !

Ceux dégradés ce jour-là l’étaient pour négligence dans le service ou insubordination ponctuelle avérée.

8ème et 110ème R.I formant la 4ème Brigade de la 2ème D.I.

Le caractère solennel donné à ce jugement militaire avait « Valeur d’exemple » tant sur les anciens que sur les nouvelles recrues.

Quel en fut l’impact sur les nouvelles recrues ou sur des déjà… vétérans ?

Un mélange de crainte et de dégoût à coup sûr ! Ceux qui étaient montés en première ligne savaient !

Cette « cérémonie » se déroule au moment même où on présente le Drapeau du Régiment aux nouvelles recrues.

Cailleretz Charles (extrait de rapport)

Cailleretz Charles (extrait de rapport)

Joseph Delplanque (extrait de rapport)

Joseph Delplanque (extrait de rapport)

Carte de la Position du 33ème R.I le 22 avril 1915

Carte 16 : Position du 33ème R.I le 22 avril 1915

Le 23 avril : On procède à la dissolution du groupe Gérard

En avril 1915, Rappel :

Le 33ème R.I, commandé par le Lieutenant- Colonel Boud’hors, fait partie de :

  • la 5ème Armée, commandée par le Général Franchet d’Espèrey
  • le 1er Corps d’Armée, commandée par le Général Guillaumat
  • la 2ème Division, commandée par le Général Brulard

La 2ème division est formée

  • des 3ème Brigade avec les 33ème et 73ème R.I commandée par le Général Duplessis
  • et 4ème Brigade avec les 8ème et 110ème R.I commandée par le Colonel Camille Lévi

Le Général Dubail, commande la garnison de Verdun de la 1ère Armée.

La 1ère Armée étant sous les ordres du Général Roques début 1915.

La 2ème Division du 33ème interviendra en soutien lors de « l’Affaire du Bois d’Ailly ».

Le 23 avril 1915 : La 2ème division se porte dans la région de Condé-en-Barrois et se rapproche des quais d’embarquement de la ligne Sainte-Ménéhould – Révigny.

Les soldats se doutent qu’ils vont partir une nouvelle fois à l’assaut mais pour où, nul ne le sait… ce qui en angoisse beaucoup !

Les 23, 24 et 25 avril 1915 voient nombre de rotations et de déplacements avant la mise en place de la nouvelle disposition des régiments du 1er Corps d’Armée.

Carte 17 : Disposition du 1er Corps d’Armée le 25 avril 1915 (Le 33ème n’y figure pas).

Carte de la disposition du 1er Corps d’Armée le 25 avril 1915

Carte 17 : Disposition du 1er Corps d’Armée le 25 avril 1915 (Le 33ème n’y figure pas).

Le 25 avril 1915 : Le sort du 33ème R.I et de la 2ème Division vont diverger du reste des éléments du 1er Corps d’Armée.

Le Général Dubail envoie au général en Chef un télégramme chiffré, pour le mettre au courant de la situation plus que délicate aux Eparges et dans le secteur Nord du côté de la tranchée de Calonne. Il lui demande de laisser la division du 1er Corps, qui n’est pas encore embarquée en réserve afin de devenir soutien des opérations du saillant de Saint-Mihiel.

Cette division est la 2ème Division, celle du 33ème.

Général Dubail : « J’estime que c’est indispensable pour assurer la résistance et surtout pour fournir la riposte nécessaire.

A 21 heures, par téléphone, le général en Chef me donne la division du 1er Corps que j’ai demandée. Je saute en auto pour aller prévenir le général Roques et lui spécifier que ce renfort est destiné, non à alimenter la lutte à la tranchée de Calonne, mais bien à riposter au Bois d’Ailly. Long entretien avec lui à ce sujet. Je lui annonce l’arrivée d’une brigade en autos, demain vers midi, l’autre brigade, le lendemain. Avec la brigade de tête, à défaut des canons qui viendront par étapes, je dirigerai vers Commercy le commandant de l’artillerie divisionnaire et les commandants de groupe pour les reconnaissances préliminaires. Mais, dès demain, il faut engager à fond le reste des régiments dont dispose le général Blazer au bois d’Ailly. Je quitte le général Roques vers minuit, et je rentre pour mettre en route la division du 1er Corps dont je dispose. »

Dispositif au Bois d’Ailly fin avril 1915 :

Pour comprendre les opérations qui interviendront au Bois d’Ailly, il est nécessaire de replacer les personnages et de préciser leurs fonctions.

Les opérations dans ce secteur sont sous les ordres de :

  • Général Dubail, Commandant des Groupes d’Armées de l’Est
  • Général Roques, Commandant de la 1ère Armée
  • Général de Mondésir, Commandant du 8ème Corps d’Armée
  • Général Blazer, Commandant de la 15ème Division (8ème Corps d’Armée)
  • Général Champeaux, Commandant de la 29ème Brigade
  • Général Krien, Commandant de la 30ème Brigade (29ème et 30ème formant la 15ème D.I)
  • Général Guillaumat, Commandant du le 1er Corps d’Armée
  • Général Brulard, Commandant de la 2ème Division (1er Corps d’Armée)
  • Général Duplessis, Commandant de la 3ème Brigade
  • Colonel Lévi, Commandant de la 4ème Brigade (3ème et 4ème formant la 2ème D.I)
  • Colonel Pellé Major Général qui assure la liaison avec l’Etat-Major du Général Joffre

Les Régiments impliqués dans cette Bataille du Bois d’Ailly sont :

  • 56ème R.I de la 29ème Brigade de la 15ème D.I.
  • 10ème et 27ème R.I de la 30ème Brigade de la 15ème D.I.
  • Le 33ème R.I et le 73ème R.I de la 3ème Brigade de la 2ème D.I.
  • Le 8ème R.I et le 110ème R.I de la 4ème Brigade de la 2ème D.I.

En fait, le 25 avril, le colonel Boud’hors avait reçu l’ordre n°82 de la 2ème D.I qui envoie le régiment à Condé-sur-Barrois pour y prendre ses cantonnements.

Il apprend alors que le transport se fera par convoi automobile à Sainte-Ménéhould .

Vient ensuite l’ordre n°83 qui envoie 2 Bataillons du 33ème à la Neuville-aux-Bois et un Bataillon au Viel-Dampierre.

Le 26 avril 1915 : Un contre-ordre, transporte le régiment en convoi auto vers Commercy. Cantonnement à Vignot où il séjourne avant d’être réorienté dans un autre secteur. Boud’hors apprend que ces multiples déplacements obéissent à :

Une instruction secrète de la Vème Armée qui maintient la 2ème Division en réserve à l’Est jusqu’à nouvel ordre. Ce qui explique l’absence du 33ème dans le dispositif général du 1er Corps d’Armée présenté ci-dessus.

Tous ces déplacements déconcertent les soldats du Régiment, la confusion l’emporte.

Les soldats vont être rapidement fixés sur la suite de leur guerre.

La 2ème Division est mise alors entièrement sous les ordres du Général Blaser Commandant la 15ème D.I qui organise ses déplacements.

Ce même 26 avril, au Bois d’Ailly, les Français ont pris, puis perdu une partie de la tranchée dite « Le Crochet ». A 20 et 21 heures, deux contre-attaques allemandes dans la même région, ont été repoussées. (Carte 18)

Secteur dit du crochet

Carte 18 : Secteur dit du crochet.

Le 27 avril 1915 :

On n’attaque pas, aujourd’hui, dans le bois d’Ailly. Le bombardement des Allemands est très violent dans cette région.

Ce 27 le 33ème R.I stationne sur Vignot alors que le 73ème reste à Soucy. (Le 33ème et le 73ème étant les 2 régiments de la 2ème Division).

Le 28 avril 1915 :

Cette journée est primordiale, elle voit se mettre en place la stratégie de l’attaque du Bois d’Ailly. Les objectifs sont définis.

La journée est employée par le général de division son E.M et les officiers supérieurs de la 3ème Brigade à des reconnaissances du Bois d’Ailly et la Tranchée de « La Vaux-Féry » en vue de l’opération prévue pour les 1ère et 2ème divisions.

Les colonels sont convoqués le 28 au matin à la Commanderie (Est de Marbotte – Ouest de Mécrin).

L’E.M reçoit l’ordre secret transmis par le Général Blazer de la 15ème D.I du 8ème corps de la 1ère armée.

Ils reçoivent alors les directives du Commandant en Chef Joffre, la prescription : « D’empêcher d’une manière absolue que l’ennemi ne remporte le moindre succès. »

Et c’est à 9 heures que la reconnaissance des lieux se fait.

Y prennent part en plus des Généraux et des Chefs de Corps, les Chefs de Bataillons des Régiments qui prendront part à l’attaque dont le Capitaine Charue, le Commandant de Bruignac et le Commandant Cordonnier.

Les militaires présents font la reconnaissance du secteur et recherchent un observatoire pour le général Blazer commandant l’attaque pour observer le front « Blockhaus – Champignon », reconnaissance minutieuse mais vaine.

Objectifs généraux : Voir carte 19

L’objectif est d’enfoncer définitivement la ligne allemande dans le secteur.

La 15ème D.I, qui le 5 avril avait surpris les Allemands et leur enleva la partie sud du Bois d’Ailly, doit commencer l’assaut sur la partie du Bois d’Ailly à enlever aux Allemands dès le 28.

Les difficultés de préparation par l’artillerie obligèrent le Général de Mondésir à reporter au 30 avril l’attaque que le 8ème Corps devait mener le jour même.

Le 8ème Corps, renforcé par la 2ème D.I devait, le 30 avril au matin prendre l’offensive sur le front Bois d’Ailly – Vaux-Féry.

Il aurait comme objectif, d’abord la lisière nord du Bois d’Ailly et ultérieurement, la croupe à l’ouest du Bois Pernosse. (Carte 11)

Les 2ème et 15ème Divisions seraient accolées, la 2ème à l’Est, la 15ème à l’Ouest.

La 2ème Division aurait à garder sur sa droite, du côté de la Tête à Vache. (Carte 20)

La 15ème Division devait s’organiser pendant la nuit à la corne Nord-Ouest du Bois d’Ailly.

Le Général Mondésir compléta son ordre le 29 avril, en mettant pour l’attaque une brigade de la 15ème division (la 30ème :10ème et 27ème R.I) sous les ordres du Général commandant la 2ème D.I.

L’artillerie de la 15ème Division, plus familiarisée avec le secteur, assurerait la préparation sur le front des 2 divisions.

Carte du Bois d’Ailly le 28 avril 1915

Carte 19 : Le Bois d’Ailly le 28 avril 1915

Objectifs secondaires :

La 16ème Division devant effectuer des offensives locales dans le but d’attirer l’attention de l’ennemi et de profiter de circonstances favorables. La16ème Division étant au sud-ouest de la « Tête-à-Vache ».

Celles-ci attaqueraient simultanément à 13 heures articulées en profondeur pour pouvoir pousser l’attaque à fond.

Les offensives de 1915 bois d'Ailly et forêt d'Apremont

Carte 20 : Forêt d’Apremont et environs

Le 29 avril 1915 :

La 2ème D.I organise tous ses mouvements alors que le 8ème Corps devait avoir déjà attaqué (dès le 28) mais des préparations d’artillerie difficiles à organiser font reporter l’attaque au 30 avril.

L’ennemi ne manifeste aucune activité.Ce qui conforte l’Etat-Major dans ses choix stratégiques.

30 avril 1915 :

« C’est aujourd’hui que le 8° Corps (15ème Division Blazer) et la Division Brulard (2ème Division) attaquent dans le Bois d’Ailly. L’offensive est prise à 13 heures. Je me rends, à ce moment, au poste de commandement du général commandant le 8ème Corps (Mondésir). De mauvaises nouvelles ne tardent pas à nous arriver du front. En résumé, après avoir pris pied dans le Blockhaus et dans les tranchées voisines, les troupes sont ramenées à leurs tranchées de départ. On reprend la préparation en vue d’une attaque nouvelle, qui est fixée à la nuit tombante, c’est-à-dire au même moment que celle qui a pour objectif la corne nord-ouest du Bois d’Ailly. »

Ce fut le compte-rendu du Général Dubail pour cette journée du 30 avril.

Mais il ne reflète pas l’âpreté des combats qui furent très violents.

*

L’attaque du Bois d’Ailly du 30 avril 1915

I : Les préparatifs

1°) L’attaque fixée à 13 heures, les objectifs ont été définis, restent le déroulement de l’opération à observer :

  • 56ème R.I de la 29ème Brigade de la 15ème D.I .
  • 10ème et 27ème R.I de la 30ème Brigade de la 15ème D.I.
  • Le 33ème R.I et le 73ème R.I de la 3ème Brigade de la 2ème D.I.
  • Le 8ème R.I et le 110ème R.I de la 4ème Brigade de la 2ème D.I.

2°) Résumé des attaques :

Le 1er Bataillon du 10ème R.I qui devait enlever le Blockhaus s’élance aussitôt le tir d’efficacité d’artillerie effectué (13h), il est accueilli par une fusillade nourrie dès sa sortie des tranchées. Néanmoins, certains éléments réussissent à pénétrer dans le Blockhaus et dans quelques tronçons de la Courtine entre le Blockhaus et Champignon.

Ils en sont chassés peu après et la troupe d’attaque regagne la tranchée de départ.

La compagnie du 27ème qui attaquait par l’ouest du dispositif est également repoussée par une vive fusillade de la première ligne allemande, elle aussi reflue.

A 19h50, cette attaque est renouvelée par le 56ème et un Bataillon du 10ème ainsi que par un Bataillon du 33ème pour attaquer sur tout le front.

La mission reste la même, enlever le blockhaus. Celle-ci échoue pour la même raison*.

Les unités restent bloquées dans les tranchées.

*A voir plus bas

3°) Le déroulement : Carte 21

Le 8ème Corps d’armée renforcé par la 2ème D.I procède le 30 avril à 2 attaques principales.

Attaque de droite :

Elle est confiée à la 2ème D.I renforcée du 10ème R.I et de 2 compagnies du 27ème.

  • 1er Objectif : Ligne Blockhaus – Courtine – Champignon (2ème D.I du 33ème)
  • 2ème Objectif : Lisière Nord du Bois d’Ailly

Cette attaque aura lieu à 13 heures. Elle sera préparée par l’artillerie de la 15ème Division qui utilisera :

  • 2 canons de 58 et 2 canons de 80
  • Les lances-mines et tous les mortiers de la 15ème Division. (moins 1 pour l’attaque de gauche)

Le tir de préparation sera suivi par un tir d’efficacité qui durera de 12h55 à 13heures.

Pour aider l’attaque de la 2ème D.I, 2 compagnies du 27ème R.I seront rassemblées à 12h45 dans la partie F de l’ouvrage en U et le plus près possible du point R.

Des gradins de franchissement seront préparés.

  • A 13 heures, au moment même où l’attaque de droite sortira des tranchées, une compagnie du 27ème se précipitera par les gradins sur la tranchée ennemie en face d’elle
  • La compagnie suivante appuiera la première et prolongera si possible la zone conquise vers l’Ouest en face de l’ouvrage en U

Attaque de gauche :

15ème Division moins le 10ème R.I

  • Objectif 1 : La zone tranchée d’avant ligne point 1.M.B x.y
  • Objectif 2 : Buisson des Jumelles et corne N.O du Bois d’Ailly

Attaque qui partira à 19h30 avec 2 bataillons du 110ème.

Carte du Bois d’Ailly le 28 avril 1915

Carte 21 : Les attaques du 30 avril 1915 au Bois d’Ailly.

4°) Equipement :

Tous les hommes auront le sac à dos. Ils auront des vivres pour 2 jours et 200 à 300 cartouches chacun, des explosifs et des outils. Les bidons seront pleins.

Signé Blazer (Commandant de la 15ème D.I et Coordonnateur des attaques du secteur).

II : Les évènements (vus par le 8ème Corps d’Armée)

1) La compagnie du 33ème qui devait attaquer la Courtine et le Champignon n’a pas abouti. Sur tout le front d’attaque, c’est un échec absolu.

2) A 18h30, le général commandant la 30ème Brigade donne l’ordre de recommencer l’attaque. Le bataillon Charue (1er du 33ème R.I) doit attaquer le blockhaus face sud et est.

3) La préparation par l’artillerie sur le secteur est nulle, les mortiers ne sont pas en action et le bataillon du 33ème qui doit attaquer la face sud et est n’est pas en place.

4) A 22h, les éléments du 10ème et du 33ème qui devaient exécuter l’attaque du blockhaus à 19h30 n’ont pas pu déboucher en raison d’une fusillade intense venue des tranchées allemandes restées intactes.

5) L’action reprise à 22 heures fut rapidement arrêtée par les feux rapides de l’infanterie ennemie, prouvant que celle-ci n’avait pas été entamée.

Le Général de Mondésir (Commandant le 8ème C.A) écrivit au Général Roques que :

« Sur tout le front attaqué, l’ennemi avait pu continuer, au cours même de notre préparation immédiate et au moment de l’assaut, des feux intensifs d’infanterie. L’ennemi avait donc créé dans les tranchées des abris à l’épreuve de nos projectiles.

L’attaque pourrait cependant être reprise avec des chances d succès si l’on accumulait plus de moyens, notamment avec de gros engins de tranchée et si la 2ème Division était laissée au 8ème Corps. »

Il poursuit :

« Le Bataillon du 10ème qui devait enlever le blockhaus s’élança aussitôt après le tir d’efficacité à gauche de la 2ème D.I . Il est accueilli dès sa sortie par une fusillade nourrie. Néanmoins certains éléments réussissent à pénétrer dans le blockhaus et dans quelques tronçons de la courtine entre le blockhaus et le champignon. Ils en sont chassés peu après et les troupes d’attaque regagnent les tranchées de départ. »

*

Les causes de l’échec sont : (Différents rapports du commandement des opérations)

1°) L’Artillerie : La préparation de l’attaque par l’artillerie n’a pas été suffisante car les tranchées du blockhaus et leurs créneaux sont intacts.
On avait considéré que le 29 avril était le dernier jour des « réactions immédiates ».

On avait estimé la préparation suffisante, les évènements allaient prouver l’inverse.

Ce que contesta le Général Dubail !

Les troupes lors de l’assaut se sont immédiatement heurtées à un réseau d’une quinzaine de mètres intact en beaucoup d’endroits, sous des feux d’infanterie et de mitrailleuses qui n’avaient pas été éteints ou venaient de se rallumer.

L’offensive s’était transformée en une sorte de « reconnaissance offensive ».

2°) Les merveilleux terrassiers allemands avaient pu, en deux jours, s’asseoir complètement avec tranchées profondes et défenses accessoires de sérieuse épaisseur.

3°) La fusillade ennemie qui a été si nourrie qu’on peut dire que la préparation d’artillerie avait laissé l’ennemi intact, ainsi que les défenses accessoires, dans lesquelles nous sommes venus nous embarrasser.

4°) Le fait que l’ennemi a pris d’écharpe l’attaque et obligea de changer de direction sous le feu.

5°) Le fait que la nuit était très claire et que l’ennemi a fait un autre usage de beaucoup de fusées lumineuses.

5°) L’état du bois complètement obstrué par les arbres abattus.

Par conséquent, l’attaque ne sera pas reprise car en présence d’organisations qui n’étaient déjà plus une ligne improvisée, nos moyens de préparation étaient insuffisants et pas assez puissants.

Mais chacun avait fait son devoir.

Les faits des jours suivants allaient apporter leur lot de déconvenue, le Général de Mondésir en paiera les conséquences comme on le verra en fin d’article.

Ordre général du commandant de la 15ème Division.

Par ordre du Général commandant le 8ème Corps d’Armée, les attaques ne seront pas renouvelées aujourd’hui 1er mai. Sur tout le front, on consolidera l’occupation des tranchées en établissant les défenses accessoires et l’on se tiendra en garde contre les attaques que pourrait tenter l’ennemi surtout au point du jour.

Il est décidé à continuer les attaques sur les trois zones :

  • de la tranchée de Calonne,
  • le Bois d’Ailly et
  • du Bois Le Prêtre.

Mais il lui est démontré maintenant qu’il ne peut pas préparer soigneusement plus d’une attaque à la fois.
Il est alors procédé à la réorganisation du secteur du Bois d’Ailly.

Le 56ème continue à assurer la sécurité du flanc gauche de la première ligne.

Le 1er mai, une cie du 33ème est mise en place à la tranchée T10.

Le 2 mai, le 33ème relève le 10ème dans tous ses emplacements.

*

Le Rôle du 33ème dans cette attaque du 30 avril 1915.

29 avril 1915 :

Suite aux nombreux déplacements du régiment depuis le 20 avril (que nous avons relaté), le régiment reçoit l’ordre dans la matinée d’avoir à franchir la route Marbotte-Mécrin le 30 pour 3 heures et de se rassembler selon le dispositif suivant :

  • 1er et 3ème Bataillons et la compagnie de mitrailleuses en première ligne dans les abris de Vaux-Féry au nord de la Croix St Jean.
  • 2ème Bataillon à la lisière sud du bois de la Croix St Jean, à l’est de la route près du chemin de terre passant à 600 m à l’ouest de l’Etang de Ronval. (Voir carte 22)

Pendant ce temps, le 73ème prend un dispositif de rassemblement articulé au Bois-Boucher et dans le ravin descendant sur Pont-sur-Meuse au Nord de Commercy, en attente d’intervention.

Départ du régiment à 22 heures. Arrivée à la Croix-Saint-Jean le 30 à 2 heures.

Carte de la mise en place du 33ème le 30 avril

Carte 22 : La mise en place du 33ème le 30 avril

Le 30 avril 1915 :

La matinée est consacrée à la préparation de l’attaque, les hommes des 1er et 3ème Bataillons seront concernés par la 1ère vague d’attaque.

Ils sont fatigués, ils ont fait une marche de nuit, un déplacement de plusieurs kilomètres dans de chemins boueux et défoncés.

Seule consolation, le beau temps est de retour, la nuit est claire.

Pas le temps de se reposer, il faut prendre position, il va falloir attaquer dans ce secteur que personne ne connait.

La journée s’annonce belle, plus de 20 degrés avec une vue dégagée. Mais pour l’ennemi la vue sera aussi plus dégagée !

La matinée est consacrée à la mise en place à la préparation des musettes, à la distribution des cartouches.

Des vivres pour 2 jours, gourde pleine, les cartouchières pleines, les chefs de compagnies exposent les consignes, les objectifs

Plan des attaques programmées à 13 heures le 30 avril 1915 des 10ème du 33ème R.I.

Carte 23 : Plan des attaques programmées à 13 heures le 30 avril 1915 des 10ème du 33ème R.I. Incendies suite explosion de « fourneau de mine ».

En exécution de l’ordre d’attaque pour le secteur de l’Est, le Général Krien donne les prescriptions du 30 avril reçues à la 3ème Brigade (33ème et 73ème) à 12h40 le 29.

L’attaque sera déclenchée à 13 heures. (Carte 23)

Un bataillon du 10ème R.I doit attaquer et prendre le Blockhaus s’en emparer jusqu’à la dernière tranchée Nord et se prolonger vers le N.O. le long de la tranchée des Bois pour favoriser le débouché de la 2ème D.I.

C’est alors que le 3ème Bataillon du Commandant Cordonnier entre en scène !

Son ordre d’attaque prévoit que 2 compagnies (10ème et 11ème) attaquent la courtine entre le Champignon et le Blockhaus, tandis que 2 autres (9ème et 12ème des Capitaines Brugne et Barra) doivent attaquer vers le Champignon.

Il est ensuite prévu que le 1er Bataillon du Capitaine Charue poursuive l’assaut grâce à une compagnie attaquant plus à l’Est ( la 4ème du Capitaine Robert).

Au nord du Champignon, enfin les 3 autres compagnies du 1er Bataillon (1ère, 2ème et 3ème ) attaquant à leur tour pour constituer des échelons défensifs au Nord du Champignon et face à l’est de façon à parer toute contre-attaque.

La 1ère compagnie du génie faisant pour sa part le lien en reliant le saillant de T8 au Champignon puis la ligne conquise dans la Tranche d’Ailly.

La compagnie de Mitrailleurs, elle, est prête à accompagner l’attaque de la courtine et aussi constituer avec le 1er Bataillon l’attaque est préparée par la Tranche de la Vaux-Ferry et par 15 mortiers Cellerier installés le jour même à 12 heures.

*

Le tir d’artillerie commence bien vers 12h40 afin de détruire ou tout au moins fragiliser le système défensif allemand.

Celui-ci se termine par 5minutes de « Tir d’efficacité » qui durera de 12h55 à 13 heures.

Conformément aux ordres donnés, l’attaque est déclenchée à 13 heures. Le bataillon Cordonnier s’élance le premier dans son secteur.

L’attaque est reçue par un feu violent d’artillerie et échoue avec des pertes énormes du côté du 3ème Bataillon ; les hommes sont rejetés sur les tranchées de départ en perdant les deux tiers des effectifs.

Pour comble d’infortune, les Allemands font exploser un fourneau de mine, en avant du saillant de T8 provoquant deux foyers d’incendie « suspects par leur régularité et leur aspect linéaire éclatant qui nous isolent complètement de nos lignes. » (Carte 23)

Les compagnies Charue n’ont pas à intervenir.

Le 33ème reste ainsi réduit à suspendre son attaque initiale (ce qui lui sera reproché).

Ordre à 15 heures de reprendre l’attaque !

Cet ordre n’est pas exécuté à cause du feu entre les 2 lignes.

L’attaque reprendra à 19h50 en limitant cette fois l’attaque au Blockhaus. Les moyens de préparation artillerie et être concentrés sur ce point.

Le Bataillon Charue a donc pour unique objectif le Blockhaus. Le Bataillon Cordonnier durement affaibli le remplacera dans la Courtine sur laquelle le 3ème Bataillon agira par le feu avant d’attaquer.

La 4ème compagnie seule peut sortir, elle est accueillie par un feu d’infanterie violent qui se déchaîne de toute la ligne allemande provoquant ainsi l’échec de l’attaque. En même temps, les « Minenwerfer » bombardent violemment les tranchées.

Les attaques du 3ème Bataillon échouent et le Commandant Cordonnier ne peut continuer son mouvement. Les Allemands usent du même stratagème qu’en début d’après-midi en faisant un feu de leurs tranchées avec de l’alcool enflammé. Les flammes s’élèvent immédiatement à 1m50 – 2 mètres de haut et sur tout le front.

Les hommes du régiment sont dans l’impossibilité d’atteindre leurs objectifs.

Les situations se figent pour la nuit malgré quelques amorces d’attaque de nuit autour de 22h.

L’ensemble des troupes attendent les ordres en ce matin de 1er mai.

Avant même, les rapports officiels, les discours concordent :

« La préparation d’artillerie de toutes ces attaques est insuffisante, les gradins de franchissement sont en nombre par trop restreint, nos défenses accessoires sont encore en place sur bien des points ! » Déplore le commandement des hommes qui participèrent aux assauts.

Le 3ème Bataillon est replié, provisoirement, au bivouac de Croix-Saint-Jean ainsi que le 1er Bataillon qui reçoit l’ordre de se replier également. Le 2ème restant en place.

Le 73ème va à Sorcy.

Les E.M de la 3ème brigade et de la 2ème D.I rentrent à Vignot et à Commercy et tirent les conclusions de cet échec du 30 avril et réorganiser l’ensemble du secteur.

Pertes : 15 tués 66 blessés et 40 disparus. Lieutenant Bocquet blessé.

*

Mais une polémique va apparaître !

Bilan de la journée vu par le 8ème Corps d’Armée (Général Mondésir)

Cause de l’échec complet :

La préparation par l’artillerie sur le secteur est nulle, les mortiers ne sont pas en action et :

Le bataillon du 33ème qui devait attaquer la face sud et est n’est pas en place.

La compagnie du 33ème qui devait attaquer la Courtine et le Champignon n’a pas abouti.

Les interrogations s’élaborent alors dans les comptes-rendus d’opérations.

Ceux qui sont partis à l’assaut dénoncent la mauvaise préparation d’artillerie avant les attaques.

On remet aussi en cause l’implication du Régiment de droite du dispositif. Sans être nommé, Le 33ème est clairement désigné !

Pour la 3ème Brigade (Général Duplessis)

Cause de l’échec complet :

1°) Préparation de l’artillerie de la 15ème D.I complètement nulle.

Aucun ouvrage des Allemands n’est détruit. Les Allemands tirent le corps au-dessus du parapet de la tranchée et nous causent des pertes très lourdes.

2°) Aucune préparation de franchissement de la tranchée ; La tranchée étant large profonde, la 15ème D.I n’a fait aucune préparation de degrés de franchissement ; Les hommes sont obligés de faire des rétablissements et de déboucher un par un.

A 9 heures du soir, l’Etat-Major de la 3ème B.I reçoit l’ordre n° 3170 : les attaques ne seront pas reprises ;

Le 73ème rentre directement à Sorcy.

La 3ème brigade rentre à Vignot.

Le 33ème reste en ligne.

Et c‘est au Commandant Cordonnier qui lui était sur le terrain qu’il faut donner le dernier mot :

Texte issu du site : Le Saillant de Saint-Mihiel

Le commandant Cordonnier reconnaît et analyse parfaitement les raisons de cet échec :

« Je reçois l’ordre d’attaquer étant dans les tranchées à 40 mètres des Boches. L’attaque échoue, défaut de préparation d’artillerie. Insuffisance de guides. Un homme est resté 24 heures entre les deux lignes. Mon poste de commandement pulvérisé, un Capitaine du 10ème sérieusement blessé. Bocquet blessé. Mon émetteur est hors de service. »

Mais dans cette action le commandant a été blessé d’une balle à la cuisse. Bien qu’il s’agisse d’une blessure douloureuse Cordonnier, pansé sommairement, refuse d’être évacué. Il s’accroche résolument à la confiance de ses supérieurs qui lui avaient octroyé à titre provisoire le commandement du 3e bataillon. A t’il peur de décevoir ? Toujours est-il qu’il ne laissera pas à un autre le soin de commander son bataillon ! Il se souvient trop parfaitement de sa première blessure à Corfélix en septembre 14 qui lui a valu non seulement une terrible souffrance pendant plusieurs semaines mais aussi un malencontreux report de sa nomination ?

Polémiques qui amène les courriers du Général Dubail au G.Q.G du Général Joffre

SECRET.

« ANNEXE n°89 » du 30 avril 1915 rédigée par :

Le Général Dubail, délégué du commandant en chef,

au général commandant en chef

Ière armée.

— Avant de partir ce matin, j’avais rédigé la note ci-jointe au sujet des dispositions d’attaque du 8e corps.

« Je rentre du front plus tôt que je ne pensais et je puis ainsi vous donner quelques renseignements sur ce qui s’est passé au Bois d’Ailly.

Après une préparation qui avait paru suffisante, les attaques se sont déclenchées vers 13 heures.

Le 10ème régiment a pénétré dans le blockhaus, tandis qu’à sa gauche, le 27ème progressait, et qu’à sa droite des fractions du 33ème prenaient pied dans la courtine.

Mais la droite de ce dernier régiment s’est trouvée enfilée, avant d’arriver au Champignon, par des feux d’artillerie venant du « Bois de la Corvée des Prêtres » ou de la route d’Apremont, et par des mitrailleuses de la « Tête à Vache ».

Elle a reculé, entraînant de proche en proche les éléments de la courtine, ceux du blockhaus qui avaient entamé une lutte dans le dédale des boyaux, et même le 27e.

C’est du moins ce qui résulte des renseignements de la première heure. J’avais eu d’abord quelques doutes sur l’attitude du 33ème ; mais on m’a assuré que ce régiment était bravement sorti des tranchées et que les tirs de barrage lui avaient fait subir des pertes sensibles. »

Ces « accusations » seront mises en avant un peu plus tard par le Général de Mondésir qui, néanmoins, sera tenu responsable de l’échec des attaques de ce secteur et qui se verra relevé de son commandement avec une nomination à la 52ème D.I dansla région de Reims le 21 mai 1915.

Ce qui amène le Général Dubail à s’interroger sur les raisons de l’échec des attaques sur le Bois d’Ailly.

Note secrète : « ANNEXE 93 » du 1er mai 1915 rédigée par :

Le Général Dubail, délégué du commandant en chef,

Au général commandant en chef.

Note où il se demande si :

1°) Ne s’est on pas trop pressé d’exécuter ces attaques ?

2°) Pourquoi n’ont-elles pas réussi ?

« A la tranchée de Calonne l’attaque s’est heurtée à un réseau d’une quinzaine de mètres, intact en beaucoup d’endroits, sous des feux d’infanterie et de mitrailleuses qui n’avaient pas été « éteints » ou venaient de se rallumer.

Dans le bois d’Ailly, au contraire la préparation avait été suffisante, puisque nos troupes avaient pu en partie pénétrer dans la courtine et le blockhaus. En beaucoup d’endroits, d’ailleurs, il n’y avait pas de fils de fer mais les tranchées devaient avoir des abris très solides car les feux de front n’ont pas été éteints partout.

Leur retour en arrière avait été surtout provoqué par le recul du régiment de droite*, subitement pris d’enfilade par des batteries et des mitrailleuses, que nos contre-batteries n’avaient pu atteindre.

En résumé, on peut dire que tout le monde a fait son devoir et faire remarquer que, si nous n’avons pas encore percé le front allemand, nous avons du moins-attiré sur nous et nous tenons accrochées des forces considérables qu’il ne faut pas lâcher. La seule conduite à tenir est donc de continuer, avec les mêmes forces, à mordre sans défaillance et sans relâche, mais en profitant de l’expérience acquise. C’est là-dessus que je suis allé, ce matin, m’entendre avec le général Roques et voici sa détermination, qui me paraît très sage. Il est décidé à continuer ses attaques sur les trois objectifs principaux de la tranchée de Calonne, du bois d’Ailly et du bois le Prêtre ; mais, comme il lui est démontré maintenant qu’il ne peut préparer plus d’une attaque à la fois, il va examiner, ce soir même, s’il faut concentrer ses moyens sur la tranchée de Calonne ou sur le bois d’Ailly, pour la faire aboutir en quelques jours. »

*Il s’agit du 33ème non désigné nommément.

Le tout débouche sur la décision que :

« 01 mai 1915 : l’attaque est suspendue ».

Mais le 33ème remonte en ligne et sera occupé à la défense du secteur du ‘’Bois d’Ailly’’avec le 73ème de la 3ème Brigade en relève d’autres régiments du 15ème Corps d’Armée.

*

Rôle du 33ème

01 mai 1915, à 9h, la compagnie de Mitrailleurs et l’équipe des mortiers Cellerier rejoignent le Régiment à la Croix-Saint-Jean. Les unités se réorganisent. Le régiment fournit les équipes de travailleurs et de transport du matériel dans les secteurs des 10ème et 27ème Régiments d’Infanterie.

A la nuit, la 6ème compagnie est envoyée renforcer la garnison du 3ème Bataillon du 10ème R.I dans la zone T8-Saillant- en face du Champignon.

02 mai 1915 :

« La 3ème Brigade de relever dans la journée la 30ème Brigade. »

Tel est l’ordre laconique reçu le matin même.

Le 33ème relèvera le 10ème ; le 73ème lui relèvera le 27ème R.I.

La relève commence à 14heures et se termine à 20heures sans incident.

  • Le 1er Bataillon prend le secteur du Blockhaus dans lequel il y a une mitrailleuse de campagne.
  • Le 2ème Bataillon prend le secteur des tranchées à l’Est du « Saillant » face à la « Tête-à-Vache » et à l’ouest du même point face à la « Courtine ». Dans ce secteur, sont installées 3 mitrailleuses.
  • Le 3ème Bataillon bivouaque à la Croix Saint-Jean avec le reste du Régiment.
Carte de la mise en place du 33ème le 02 mai 1915

Carte 22 : La mise en place du 33ème le 02 mai 1915

Les 03 et 04 mai 1915

Situation sans changement pour le 33ème, mais le secteur voit un grand chamboulement dans l’occupation du Bois d’Ailly :

  • Le 8ème R.I relevant le 56ème ;
  • Le 73ème R.I remplace le 27ème.
  • Le 110ème de la 4ème Brigade est embarqué en autobus pour Gernicourt.
  • La relève des troupes de la 15ème D.I par celles de la 2ème D.I est terminée dans l’après-midi.

Durant 2 jours, les troupes sont occupées à la confection d’ouvrages de 2ème ligne.

Et tout ceci, face aux Allemands qui observent, qui s’organisent et qui bombardent nos lignes toute la journée du 3. Le 04, l’ennemi effectue un bombardement violent venant de la zone sud de la Tête-à-Vache et de la région de la Meuse.

05 mai 1915

Toute la 2ème Division est en place, le Général Brulard avec tous les responsables des unités a arrêté le dispositif suivant :

La situation était la suivante, de la droite à la gauche :

L’escadron de la 2ème Division va à Domrémy-aux-bois.

  • 10ème Régiment :
    • Secteur « Tête-à-Vache ». (2 compagnies)
  • 33ème Régiment à Vaux-Féry Est :
    • 1ère ligne : 1er Bataillon Charue et 3ème Bataillon Cordonnier
    • 2ème ligne : 2ème Bataillon de Bruignac
  • 73ème Régiment à Vaux-Féry Ouest :
    • 1ère ligne : Bataillon Larbey et Bataillon Martin
    • 2ème ligne : Bataillon Fayen
  • 8ème Régiment : Bois d’Ailly :
    • 1ère ligne : Bataillon Glaizot et Bataillon Guérin
    • 2ème ligne : Bataillon Hinaux

Entre l’extrémité Ouest du Bois d’Ailly, gauche du 8ème et la Meuse, un espace de 1200 mètres est occupé par seulement 2 sections du 134ème R.I. (une section = 60hommes en théorie, commandée par un lieutenant). Ce régiment appartenant à la 15ème D.I.

Il y a donc eu rotation de 3 groupes de Régiments en même temps

  • 33ème – 10ème
  • 8ème – 56ème
  • 73ème -27ème

Rappel :

  • Le 33ème R.I et le 73ème R.I de la 3ème Brigade de la 2ème D.I.
  • Le 8ème R.I et le 110ème R.I de la 4ème Brigade de la 2ème D.I.

A noter que la disposition initiale des régiments ne résistera pas à la poussée allemande.

Le tout s’effectuant sous un bombardement incessant provenant de l’artillerie allemande. Allemands qui prennent bien note de toutes les évolutions face à eux.

Pendant les mouvements de toutes ces troupes, les reconnaissances vers les lignes ennemies n’ont pu se faire.

On voit bien de l’agitation en face. Les Allemands réorganisent leurs tranchées.

Ils renforcent leurs défenses d’après les observations faites aux jumelles par nos guetteurs.

« Ils craignent une nouvelle offensive française, c’est pour cela qu’ils continuent leurs bombardements fanfaronne-t-on ! »

Mais ces bombardements ne sont pas sans effets, on déplore :

Au 33ème : 4 tués et 15 blessés

Et pour les autres régiments de la division :

1 tué au 8ème et pas moins de 129 blessés dont le Capitaine de Beaucorps, les Lieutenant Rougier et Lemay du 73ème ainsi que le Capitaine Lémar du 8ème.

Les Allemands ont dû observer que le dispositif français est désormais en place et l’on s’étonne pourtant que du 4 mai 21heures au 5 mai dans la nuit, il y ait accentuation des tirs ennemis, en pleine nuit !

La réponse va vite venir !

*

Le 05 mai 1915, de 2h à 3h30 du matin, les tirs s’intensifient encore !

Les Allemands effectuent un bombardement violent et précis sur nos lignes.

Bombardement auquel notre artillerie, trop réduite ou trop peu nombreuse répond à peine.

Mais les dégâts se font sentir.

Les lignes téléphoniques sont alors toutes coupées. Les liaisons et transmissions entre les lignes françaises en sont alors fortement affectées.

Alors les Allemands profitant d’un mouvement toujours dangereux d’une relève, surtout complète, attaquent !

Le temps si beau et les nuits si claires les jours d’avant voient cette nuit-là une épaisse brume envahir la région. Le tout mêlé à la fumée des explosions continues, rendent la visibilité limitée à quelques mètres.

Et dans cette fraîcheur et ce brouillard matinal de printemps, chose incroyable les guetteurs du 8ème R.I, régiment qui occupe le Bois d’Ailly, dès le bombardement de 3h30 calmé, discernent du mouvement.

On dirait que ça bouge en face, lance un soldat apeuré… « Les boches attaquent ! »

Les soldats du 8ème aperçoivent à travers cet épais brouillard sortant de leurs tranchées, des silhouettes, à peine visibles vu la similitude des uniformes tons gris avec cette pénombre de la nuit.

Une armée des ombres ! Une véritable armada humaine… inouï !

Les forces allemandes 3 régiments bavarois : les 28ème, 65ème et 160ème sont évaluées à (10 000 hommes ?) qui avancent Nord-Sud et qui finissent par atteindre les lignes de nos armées. L’attaque suivait ce violent bombardement débuté le 03 mai et augmenté le 04 mai dès 13 heures jusqu’à cette nuit du 04 au 05.

A 5 heures, l’attaque allemande perce sur la tranchée d’Ailly du 8ème et se rabat sur la tranchée de La Vaux-Féry, celle qu’occupe le 73ème qui va souffrir de façon incroyable !

Carte des attaques sur le Bois d’Ailly le 05 mai 1915

Carte 24 : Les attaques sur le Bois d’Ailly le 05 mai 1915

En voici le déroulement :

Le bombardement allemand de préparation d’attaque avait été méthodiquement pensé et exécuté.

Dirigé non seulement contre nos tranchées et leurs boyaux d’accès, mais encore, fait relativement nouveau, contre nos batteries, qui, presque toutes, ont été encadrées et dont certaines ont subi des pertes en hommes et matériel (caissons atteints, abris défoncés). C’est à ce dernier fait et à la rupture des communications téléphoniques qu’il faut attribuer le mauvais fonctionnement des barrages.

Donc, après ce bombardement de début de nuit, profitant d’un effet de surprise, les Allemands anéantissent les sections du 134ème puis se rabattent à gauche et viennent prendre à revers les premières lignes du 8ème.

Ce régiment à la gauche du 73ème est attaqué à son tour.

La liaison entre le 8ème et le 73ème située à l’ouvrage dit « de la ½ lune » était précédemment occupée par une seule section du 8ème soit environ 60 hommes.

A cette section, le Général Blazer (15ème D.I) avait donné ordre de se retirer.

Les hommes commencent à se replier.

Le 73ème s’étire alors sur sa gauche.

Le colonel Truffer commandant ce régiment, trouvant cet ordre un peu bizarre de par l’imprudence d’un tel retrait, demande confirmation avant de l’exécuter totalement.

Le Général Blazer répond n’avoir pas souvenance d’avoir donné cet ordre !

Immédiatement, la brigade téléphone au 8ème Régiment de maintenir sa liaison.

Certes, il n’y eût aucun vide à gauche du 73ème mais il y avait eu, par ce début de déplacement du 8ème, une ‘’extension tenue’’ de l’extrême gauche du dispositif…

Chose que les Allemands surent exploiter immédiatement !

Le 8ème en mouvement est alors très violemment attaqué. L’ennemi pénètre dans nos lignes Pour le 8ème, la surprise fut totale.

Rapport d’attaque fait par le général Dubail :

« Ce régiment , le 8ème R.I* venait, dans les premières heures de la nuit du 4 au 5, de relever le 56ème sur ses positions; il a été attaqué dans la seconde partie de la nuit.
C’est, en effet, vers 3 h.15 que l’ennemi a fait irruption à la faveur du brouillard, d’après le colonel Duchet du 56ème qui a passé la nuit auprès du colonel commandant le régiment de relève.

L’infanterie allemande aurait fait brèche dans notre réseau de fils de fer, à l’aide de cisailles, dans la partie comprise entre la Maison-Blanche et la lisière ouest du bois d’Ailly, prenant ainsi de flanc nos tranchées et les boyaux voisins de cette lisière.

Voilà un fait qui ne peut s’expliquer que par l’absence complète de défenseurs, car on ne coupe pas les fils de fer à la cisaille sous le feu. Il y a donc eu abandon, sans combat, de certaines tranchées, ou plutôt, ce que j’aime mieux à croire et ce que l’enquête semble établir, erreur fatale dans une relève trop hâtive qui a laissé inoccupées certaines fractions de la première ligne. Je reprocherai, en effet, très vivement au commandement d’avoir fait relever le 56ème tout entier d’un bloc et en une seule nuit.

Les progrès de l’ennemi ont été assez vite enrayés, sous-bois, par les contre-attaques du 73ème, prononcées de l’est à l’ouest, en partant du point 8 et du saillant Beaulieu, — en terrain découvert, par un retour offensif du bataillon de deuxième ligne du 8ème…* (bataillon de Mécrin-bois Mullot), qui a réoccupé la carrière, on dégageant deux pièces de 75, en batterie près de ce point, et refoulé les fantassins allemands sur Maison-Blanche.

En résumé, les faits caractéristiques de cette attaque sont:

1°) La surprise du régiment due, semble-t-il, d’une part à ce que ce régiment venait d’arriver trop hâtivement en ligne, sur un terrain imparfaitement reconnu ;

— d’autre part, à la qualité médiocre des cadres subalternes entièrement renouvelés depuis quelques semaines, ce qui expliquerait dans une certaine mesure la défaillance du régiment, sans la justifier.

2°) La supériorité prise par l’artillerie ennemie sur nos batteries, supériorité qui tient à la fois à la précision du tir (réglage par avions) et à une consommation de munitions de gros calibre que les chefs d’artillerie estiment vingt fois supérieure à la nôtre, au bas mot. La surprise du 8ème…* est certainement imputable à des fautes professionnelles, commises par les cadres de ce régiment; mais il n’en reste pas moins qu’il était imprudent de relever le 56′ d’un seul bloc, en une seule nuit, par ce corps. Il importe, à ce sujet, de mettre une fois de plus en lumière, l’usage presque exclusif que font les Allemands, dans les opérations actuelles, de l’artillerie lourde approvisionnée à un taux qui rappelle les bombardements sur zone du début de la guerre. Les tirs de 77 sont exceptionnels. Je ne puis rivaliser ni comme calibre, ni comme nombre de pièces lourdes, ni surtout comme disponibilités en munitions. »

*Non écrit dans le rapport

*

Déroulement suite :

La manœuvre allemande de 3h30 est facilitée par le brouillard, un bataillon du 8ème est entouré et l’ensemble est fait prisonnier.

Le reste du 8ème « tourné » par la « Maison-Blanche » et les boyaux à la fois de la sablière et ceux de la carrière reflue sur le 73ème qui se défend énergiquement.

Mais poussé par une formidable masse allemande, il recule inexorablement pied à pied mais refuse de capituler !

Héroïquement, il combattra pendant 17 heures avec acharnement et abnégation.

Ce combat fut effroyable pour le 73ème qui a plus de 1000 hommes hors de combat en cette seule journée du 05 mai 1915.

La résistance s’organise immédiatement au point 5, limite actuelle de l’attaque (vers 6 heures).

Les poussées s’opèrent Est-Ouest. Le 73ème sera alors aidé par le 33ème.

Le Bataillon Hinaux du 8ème reprend la carrière à 6h25.

Le 73ème, perdant des hommes en quantité considérable.

A 7h15, Ordre est donné par le Général Duplessis de la 3ème Brigade de garnir la 2ème ligne dans le secteur de la ‘’Tranchée Vaux-Féry Ouest’’, c’est le 33ème qui assure cette mission.

*

Le Rôle du 33ème

Les régiments souffrent, les pertes sont considérables, le 73ème sera le plus touché !

Le 33ème, menacé à son tour d’être débordé par suite du mouvement du 73ème, se trouve directement attaqué mais maintient quand même son front.

Le 33ème avait été sollicité dès le début de l’offensive allemande.

Dès 2heures, les hommes entendent un très violent bombardement qui s’abat sur les bois de La Croix Saint-Jean, où se trouve le Bataillon Bruignac.

En même temps, l’attaque allemande malgré un épais brouillard sur le Bois d’Ailly (8ème R.I) amène les 1er et 3ème Bataillons à venir renforcer ce secteur vers 4 heures.

A 5 heures, L’attaque allemande ayant percé dans la Tranche d’Ailly, les guetteurs annonce que l’offensive allemande progresse et se rabat sur la Tranche La Vaux-Féry Ouest (73ème R.I).

Dès 6h40, Le commandant Cordonnier, reçoit l’ordre d’attaquer ’’La Sablière’’ en débouchant de la Corne N.O du Bois-Mullot. Le commandant Cordonnier part avec les 10ème et 11ème Compagnies.

Les 9ème et 12ème compagnies (Bruque et Barra) occupent les ouvrages de la croupe de la Croix-Saint-Jean au sud du Blockhaus.

A 7h15 : Le commandement de la 3ème brigade décide de ‘’garnir’’ la 2ème ligne dans le secteur de la ‘’Tranchée Vaux-Féry Ouest’’, celle où le 73ème subit le choc de l’offensive allemande.

A 7h40 : La 4ème compagnie du Capitaine Robert (du 1er Bataillon) est mise sous les ordres du Commandant Cordonnier qui prendra les commandements des 4-9-10-11-12ème compagnies du 33ème R.I et reprendra le poste de commandement dit ’’Poste 8 bis ’’situé dans le ‘’boyau du génie’’.(voir carte 24)

A 7h45, Une contre-attaque est déployée. Les poussées s’opèrent en 2 points avec les 5 compagnies du 33ème venant en renfort du 73ème R.I. pour le secteur Est-Ouest.
Le secteur Sud-Nord étant défendu par le 8ème qui avait repris ‘’la carrière’’ à 6h25.

Cette contre-attaque permet de reprendre quelques tranchées que les Allemands venaient d’occuper le matin même.

La situation se stabilise pour une bonne partie de la journée mais les actions continuent de tous côtés mais sans l’aspect spectaculaire des premières heures.

8h10 : Le Régiment est dans la situation suivante :

  • En 1ère ligne :
    • Face au Blockhaus.se mettent en place les 1ère et 2ème compagnies (1er Bataillon) avec le commandant du Bataillon, le Capitaine Charue
    • Le 2ème Bataillon (de Bruignac) se transporte dans le secteur Vaux- Féry Ouest
    • Les 5 compagnies (4-9-10-11-12) sous les ordres du Commandant Cordonnier (3ème Bataillon) sont prêtes à intervenir
  • En 2ème ligne la 3ème compagnie et la compagnie de pionniers* dans les ouvrages n° 11-12-13-15. (non visible sur la carte)

*Un pionnier est un soldat utilisé pour effectuer des tâches techniques et de construction. Le terme est en principe similaire à celui de sapeur.

A 8h50, Toutes les liaisons téléphoniques sont rétablies.

Le bombardement des bois continue.

L’attaque de notre régiment avance lentement dans le « Boyau du Génie ». La progression est lente, pénible, harassante pour les combattants des 2 côtés.

Ces rudes combattants livrés à eux-mêmes dans un chaos généralisé alors que la chaleur dissipe les brumes matinales et rend l’atmosphère suffocante.

Il faut supporter ce bruit infernal des explosions, des destructions et de la mitraille. Ce qui n’est rien à côté des cris des blessés, des hommes de chaque camp qui souffrent de longues heures durant, coincés entre les lignes, hurlant en espérant une mort prochaine ou attendant une hypothétique évacuation sur l’arrière.

La souffrance n’a pas de patrie.

Au risque de leur vie, toute la journée, les brancardiers essayent d’évacuer les blessés qui se comptent par centaines.

L’artillerie continue inexorablement ses tirs sur les lignes du camp adverse.

Cette pluie d’obus a tout ravagé tout dans le secteur, les parapets s’éboulent dans les tranchées, les abris sont détruits.

Mais il faut tenir, malgré tout !

Pendant que les troupes se protègent tant bien que mal, tapis dans les trous du terrain, cherchant le meilleur abri pour être hors de portée des tireurs ennemis, les Etats-Majors multiplient les observations, envoient quelques éclaireurs qui (parfois) ramènent des informations sur les positions allemandes.

Se servant de l’ensemble de ces données,

A 15h30, Une contre-attaque est ordonnée sur le « boyau du 56 ». Elle nous rend une partie de ce boyau et de la sablière.

17heures, le Commandant Cordonnier s’installe dans le « Bois Mulot » face à la « Maison-Blanche » et face au boyau des « anciens abris des chevaux-légers ».

19 heures, Les allemands tentent une nouvelle attaque sur la Vaux-Féry.

La ligne du 73ème cède ; les Allemands progressent au sud de la ligne face au capitaine Charue.

Ils entrent aussi dans le boyau 29bis. Le lieutenant Mayot établit au bout de ce boyau, un bouchon. Acte de bravoure suprême !

Ce barrage est défendu avec une rare énergie et au prix de pénibles sacrifices.

La poussée allemande échoue.

Le général Dubail, informé des difficultés rencontrées dans le Bois d’Ailly, décide de renforcer ce secteur.

Dans la journée, le Général Mondésir qui commande la 8ème Armée fait venir en ligne des éléments de la 15ème Division où il est demandé à chacun de s’efforcer à :

1°) réussir le mélange des unités. Ce qui se fait dans la journée.

2°) de reprendre une partie des tranchées perdues.

La liaison du 27ème s’établit avec le Capitaine Charue pour une attaque de nuit.

Les tranchées T6 et T10 sont également à nouveau barrées à l’est du poste 10 (PC du 27ème).

A 20h20 l’attaque ennemie ne progresse plus. La nuit reste tendue dans tous les secteurs. Des opérations sont envisagées mais la pénombre aidant, les positions se figent momentanément.

Secteur où se trouvent les anciens "Abris des Chevaux-Légers"

Secteur où se trouvent les anciens « Abris des Chevaux-Légers »

06 mai 1915 :

L’attaque de nuit n’aboutit pas.

Le Général Dubail :

« Je comptais aller à la Ière Armée (bois d’Ailly), où les attaques ne me paraissent pas menées avec toute l’énergie et’ toute la ténacité voulue. Je me contente d’inviter le général Roques à redoubler d’énergie pour réparer la défaillance récente. »

Informés de cette visite (reportée au lendemain), les généraux de la 2ème D.I ordonnent au petit matin la continuation de la contre-offensive en vue de reprendre le terrain conquis.

Le 33ème conserve son terrain. La dernière attaque allemande ayant été enrayée en début de journée.

Le régiment prend position sur le secteur après la modification du front. (en pointillés rouge sur la carte 25)

Carte du secteur où le 33ème est en charge d’aménager le secteur, le 06 mai 1915. Modification du front.

Carte 25 : Secteur où le 33ème est en charge d’aménager le secteur, le 06 mai 1915. Modification du front.

Les 1ère et 2ème compagnies occupent la tranchée T6 en liaison avec le 27ème R.I à l’ouest et avec la 6ème compagnie du 33ème à l’Est.

A 10 heures, le 2ème Bataillon du 33ème R.I enregistre une alerte suivi d’un barrage d’artillerie.

Il y a des morts et des blessés.

A 12h15 se produit l’explosion de 5 fourneaux allemands dans le secteur du champignon, suivi d’un bombardement des 2ème lignes. Les hommes, dans l’urgence s’emploient à la réfection des parapets.

La fin de la journée voit les protagonistes camper sur leurs positions.

Ce 06 mai 1915, on déplore :

  • 33ème : 5 tués et 12 blessés
  • 27ème : 4 tués
  • 73éme : 1 tué, 1 blessé et 4 disparus.

Le 7 mai 1915 :

Malgré les rotations des régiments, les troupes sont toujours sous le commandement de la 15ème Division (Général Blazer).

La situation se stabilise.

La ligne française est établie le plus solidement possible.

Rien ne se passe dans le secteur du 1er Bataillon du 33ème R.I alors que l’on aperçoit les Allemands placer des échelles contre les parapets mais en définitive, ils n’attaquent pas.

Le tir violent de l’artillerie ennemie dure toute la journée.

A 15 heures, au 2ème Bataillon, se produit une vive fusillade allemande.

Les « Minenwerfer » (nom donné aux mortiers allemands) sont très actifs.

Pour le 33ème, les choses évoluent :

Le secteur Bois d’Ailly – La Vaux Féry, auparavant sous tutelle de la 15ème Division est placé sous l’autorité du Général Duplessis et sa 3ème Brigade en liaison avec la 30ème Brigade du Général Krien.

Au 3ème Bataillon, les Allemands procèdent à une fusillade de 21h45 à 0h45. C’était au moment où la 12ème compagnie du 33ème est remplacée par une compagnie du 134ème R.I.

Preuve que les Allemands observent nos déplacements.

Mais une seconde polémique va apparaître !

Bilan de la journée vu par le Général Dubail commandant de la 1re armée, groupe d’armées de l’Est, 1914-1916.

(Journal de Campagne / Général Dubail.1920-1921)

7 mai 1915 :

« Les attaques que nous avons tentées un peu avant le jour au bois d’Ailly, n’ont donné aucun résultat.

Mais une attaque allemande, à la Maison-Blanche, n’a pas réussi davantage. Néanmoins, la situation me parait assez sérieuse, dans la nuit, pour motiver ma présence ; je me rendrai donc au bois d’Ailly, remettant, au contraire, à demain ma visite à la IIIème Armée.

Je vais au poste de commandement du général Blazer (carrière au sud du bois Mullot), et j’y trouve tous les généraux réunis.

Séance un peu orageuse. Je reproche au commandement d’avoir fait relever tout un régiment de première ligne en une seule nuit, d’où les erreurs inévitables qui ont profité à l’attaque. Mais je ne suis pas tendre non plus pour le régiment* qui a cédé trop facilement.

Je sais que ce régiment s’est bien conduit aux Eparges, et qu’il y a perdu beaucoup de monde, ce qui a réduit son encadrement en nombre et en qualité, et c’est pourquoi je me contente de ces observations ; mais je compte que le corps rachètera sa défaillance à la première occasion.

Je rentre au Q. G., à 12 h. 3o. »

*le 8ème R.I

Dans la soirée, le 8ème R.I est relevé. Tout le Régiment est transporté vers Pont-sur-Meuse.

08 mai 1915 :

Pour le Régiment, l’heure du repos n’a pas encore sonné ! Le danger est permanent.

Au 1er Bataillon se produisent encore 2 alertes à 21h50 et 0h50.

Un violent bombardement allemand fait réponse au tir des bombes « Save »**.

Au 2ème Bataillon, alerte à 1 heure : les Allemands lancent dans la journée des torpilles. Le parapet est complètement nivelé sur une largeur de 6 mètres.

Au 3ème Bataillon, les hommes sont occupés à renforcer la fortification de la position pour créer une première ligne de défense.

Les événements des dernières semaines et les nombreuses victimes qui n’épargnèrent pas les officiers du 33ème obligent les autorités à muter des cadres d’autres unités pour renforcer et réorganiser le régiment.

**Les troupes du 8ème Corps d’Armée (général de Mondésir) utilisaient les munitions de la manufacture de Commercy. Ateliers où fut réalisé un projectile qui fut connu par sa simplicité ; ce projectile prit le nom d’un des inventeurs, un ingénieur des Arts et Manufactures : le lieutenant Save reconnu pour être particulièrement « débrouillard ». Spontanément, l’engin prit le nom de « Bombe Save ». Pour plus de précision voir l’article de la Revue Militaire Suisse : Les services de l’artillerie en forêt d’Apremont 1914-1915.

Les mutations suivantes se produisent :

  • Le Chef de Bataillon Lagrange du 1er Tirailleur au commandement du 1er Bataillon du 33ème R.I
  • Le Sous-Lieutenant Gerbier de la 3ème compagnie au commandement de la 3ème compagnie
  • Le Capitaine Charue du commandement du 1er bataillon au commandement de la 9ème compagnie***
  • Le Sous-Lieutenant Clément, de la 4ème compagnie au commandement de la 4ème compagnie
  • Le Sous-lieutenant Leforestier de la 9ème à la 10ème compagnie.

***Le capitaine Charue n’avait pas démérité, il recevra d’ailleurs la Croix de Guerre le 4 juillet de la part du Général Brulard commandant la 2ème D.I. mais il avait été nommé à titre provisoire à la tête du Bataillon suite à la blessure du Commandant Deshayes le 06 avril 1915 au bois de Darmont… Et n’ayant pas le grade de Commandant, grade d’Officier Supérieur nécessaire pour être en charge d’une telle responsabilité, sa nomination ne pouvait être que provisoire. Le règlement, c’est le règlement !

09 mai 1915 :

Les belligérants du Bois d’Ailly semblent s’accommoder des positions acquises après les combats de la semaine écoulée. Les troupes sont épuisées et fortement fragilisées. Mener de nouvelles attaques est illusoire.

Seuls quelques échanges d’artillerie maintiennent l’agressivité.

Les « Minenwerfer » détruisent nos parapets, nos « Crapouillots » les leurs.

La réponse est la création d’un boyau pour circuler dans le bois Mulot en traversant le « Layon dangereux ». Des tranchées sont en projet, d’autres aménagées. (carte 26)

La rectification de la 1ère ligne des tranchées est attribuée au 3ème Bataillon qui aménage le secteur entre l’ouvrage « k » et le 73ème Régiment établi à l’ouest du « Boyau du Génie ».

Aménagement des tranchées au ‘’Bois d’Ailly’’ dès le 06 mai 1915

Carte 26 : Aménagement des tranchées au ‘’Bois d’Ailly’’ dès le 06 mai 1915

10 mai 1915 :

Les Allemands procèdent à 2 petites attaques vite repoussées.

Reconnaissance du Chef de corps ( Lieutenant-Colonel Boud’hors) portant sur l’organisation d’une 2ème ligne de tir coupant le saillant du Champignon (carte 25).

Il fait d’autres recommandations (exemple : la ligne formée par a3 a2 et B26 n’est pas pratique : elle manque de vues. Elle est enfilée par l’Est et retournée par les Minenwerfer).

On signale des travaux allemands sur la croupe 362 et aussi à l’Est de la Sablière dans le Ravin du Bois Mullot.

Ces recommandations précèdent une rotation de régiments qui aura lieu pour le 33ème dès le lendemain.

Et ce départ de la 2ème D.I du Bois d’Ailly permet d’en dresser le triste bilan :

Pertes, Récapitulatif

33ème Régiment d’Infanterie :

  • Tués : 65
  • Blessés : 212 dont 10 officiers
  • Disparus : 146
  • Total : 423

Officiers Blessés :

  • Capitaine Dumont
  • Lieutenant Bocquet
  • Lieutenant Robert
  • Sous-Lieutenant Baudrin
  • Sous-Lieutenant Caron
  • Sous-lieutenant Dacheville
  • Sous-Lieutenant Delangre
  • Sous-lieutenant d’Halluin
  • Sous-Lieutenant Henry
  • Sous-Lieutenant Ripoton

Il faut rajouter :

Le Commandant Cordonnier blessé à la cuisse mais qui a tenu, courageusement, à garder son poste malgré les souffrances endurées !

(Le 73ème, autre régiment de la Brigade a 16 officiers hors de combat ainsi que 1175 hommes de troupe.)

11 mai 1915 :

Le régiment est décimé, son remplacement en 1ère ligne est devenu une priorité.

La situation est sans changement dans le secteur ce qui permet son transfert à l’arrière.

Le régiment est ainsi relevé à partir de 20 heures et rejoint un cantonnement provisoire à Sorcy.

Il y arrive à 4 heures le 12 mai.

Suivent quelques mouvements :

  • Il s’embarque le lendemain pour Épersat, Crugny et Unchair.
  • Il y stationne jusqu’au 17, époque à laquelle il est dirigé par étapes vers Breuil-Sur-Vesles et Romain (Aisne).
  • Il va alors rejoindre le secteur de La Ville-au-Bois (Mai-Août 1915) où la lutte va se poursuivre.

Dans le Bois d’Ailly, les choses vont encore évoluer :

Le 14 mai 1915 :

« Dans la nuit, les Allemands ont bombardé violemment nos positions de la forêt d’Apremont et attaqué en forces, au petit jour, entre la Tête-à-Vache et la Meuse. L’attaque a échoué, à droite, sur la Tête-à-Vache. Elle avait momentanément réussi à gauche ; puis la situation a été rétablie. Au centre, les Allemands sont parvenus à s’emparer de deux tranchées ; le combat continue.

Nuit agitée au bois Le Prêtre : les Allemands bombardent les tranchées conquises ; nous nous maintenons sur nos positions et réalisons même un léger progrès.

A 10 heures, mauvaises nouvelles du 8ème Corps, qui s’est laissé enlever sa nouvelle première ligne, dans le bois d’Ailly. Nous tenons le saillant des Mitrailleuses, les ouvrages de soutien, ouvrage Pédelmas et raccord avec la carrière. Les Allemands ont attaqué avec une extrême violence entre la Meuse et la Tète-à-Vache. Ils paraissent avoir mis en ligne au moins trois régiments. Je suppose qu’ils ont eu vent du départ de la 2ème Division et qu’ils ont voulu empêcher ce déplacement de forces.

Le général Roques a immédiatement réagi en faisant venir un bataillon et demi du 31ème Corps pour relever, sur la seconde ligne, une partie des troupes du 8ème Corps destinées aux attaques. De plus, il a donné au 31ème Corps l’ordre d’attaquer aujourd’hui et à la 73ème Division celui de reprendre l’offensive demain.

J’ai, de mon côté, alerté la brigade de Belfort, qui s’embarquera, à 18 heures, à Einvaux et Blainville et sera, demain matin à Sorcy, Void, pour être employée aux contre-attaques demain soir, ou mieux après-demain 16.

Je compte beaucoup sur l’entrée en ligne de cette unité; j’ai, au contraire, peu d’espoir de voir la situation complètement rétablie avec les troupes du 8ème Corps, parmi lesquelles le 56ème seul est à peu près frais. »

Quatre années de commandement, 1914-1918 (1re armée, groupe d’armées de l’Est, armées de Paris) : journal de campagne / […] Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Cette nouvelle poussée allemande oblige les troupes à reculer encore (voir carte 25) et l’évolution des lignes de tranchées à partir du 15 mai mais… ceci ne concerne déjà plus le 33ème R.I…

Soldats au bivouac au Bois d’Ailly

Soldats au bivouac au Bois d’Ailly

Route descendant du Bois d'Ailly, du pare-balles à Marbotte

Route descendant du Bois d’Ailly, du pare-balles à Marbotte – 1915 © Bibliothèque municipale de Dijon

Prochain article : LA VILLE-AU BOIS (Mai-Août 1915)